Page:Rebell - La Nichina, 1897.djvu/330

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Des coups secs s’abattirent sur de la peau nue, puis des sanglots, des gémissements éclatèrent.

— Oh ! Oh ! criait-on, mon bras ! oh ! oh ! ma jambe ! mon Giannico, par pitié ! oh ! oh ! aah !

— Tiens ! en veux-tu encore ! Tiens ! l’as-tu, celui-là. Et cet autre ! Tiens ! Tiens ! Tiens !

La Barbozzina s’élança au dehors avec des hurlements de chienne battue. Comme elle fuyait de mon côté, j’eus peur que son ruffian, s’il s’avisait de la poursuivre, ne me confondît avec elle, et prise de peur, je me sauvai de cette ruelle infâme. Je ne sais comment, pareille à un cheval qui reprend le chemin de l’écurie, je revins sur la place de Sainte-Marie-la-Belle et je me trouvai devant la maison de Fasol. Je crus que c’était mon destin qui l’avait voulu et je me décidai à rentrer.

Il était dans son atelier, étendu sur un lit et considérait la grande fresque de ses Bains de Diane. Il tressaillit en me voyant et d’abord je pensai qu’il allait me battre, mais il resta couché sans prononcer un mot.

— Fasol ! dis-je, j’ai faim.

Alors il se leva, courut me chercher un pâté, du pain, un flacon de Trebbiano. Je dévorai tout ce qu’il me servit, puis j’allai m’étendre dans un coin de l’atelier, tandis qu’il me suivait des yeux.

— Nichina ! appela-t-il.

Et comme je ne répondais pas :

— Nichina ! voyons, réconcilions-nous !

Je me relevai, ayant retrouvé en une fois toute mon ancienne hardiesse.

— Tu veux te réconcilier, m’écriai-je, c’est ton affaire, cela ! Est-ce que je suis quelque chose, moi ? est-ce que je puis traiter d’égal à égal avec toi ? est-ce qu’il ne faut pas subir ta bonne et ta mauvaise humeur, ton plaisir et ta cruauté, tes baisers et tes coups !