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LES NUITS CHAUDES DU CAP FRANÇAIS


ramage pareil au tien. Cela ne m’a pas encore tourné la tête.

— Ah ! sot, sot, criait-elle, sot qui ne sait pas comprendre.

— Qu’est-ce donc que je ne sais pas comprendre ?… que tu ressembles à toutes les filles de ta sorte, que seul l’or peut te faire battre le cœur ? En vérité, cela n’est pas difficile à voir… Il faut être raisonnable, Zinga : tu es belle, tu peux t’en vanter ; dans ta race, on n’en compte point des centaines comme toi, c’est sûr ; mais vas-tu, pour cela, exiger de l’amour de tous ceux qui t’ont payé tes baisers ? Je ne suppose pas que tu aies l’âme si despotique, ni si niaise.

Là-dessus, Dubousquens apparut à la fenêtre, haussa les épaules et eut un coup d’œil vague vers l’avenue. J’eus le temps de voir et d’étudier son visage. C’était un homme d’une trentaine d’années, et, bien qu’assez gros, de belle prestance dans son gilet brodé et sa chemise de dentelle ; il avait le regard intelligent, avec quelque chose de ce dédain un peu fat, ordinaire aux gens d’esprit rapide et superficiel. Son œil n’observait pas ; à demi-clos, peut-être ne se faisait-il voir que pour laisser luire sur tous son éclair méprisant. La graisse, qui déjà alourdissait sa face, ne lui permettait pas de montrer cette vivacité des physionomies tout en traits, que transforment les moindres impressions ; elle était comme un déguisement de sa pensée et une défense contre son entourage ; en revanche elle accusait ses instincts avides et violents : la luxure, peut-être la cruauté. Sa bou-