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Page:Rebière - Mathématiques et mathématiciens.djvu/213

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MATHÉMATIQUES ET MATHÉMATICIENS

pécher l’esprit de se laisser défaillir dans cette pénible carrière, en rendant odieuse, sous les noms de présomption et d’orgueil, la conscience qu’on a d’être indépendant et libre ; car c’est par le mouvement seul de la pensée que l’homme est libre et s’appartient. Quiconque porte en soi l’idée d’une science, ne peut manquer d’apprécier les choses d’après la manière dont l’intelligence humaine s’y révèle : de ce point de vue élevé, bien des choses devront lui paraître futiles, qui peuvent sembler aux autres d’un assez grand prix.

Charles-Gustave Jacobi.
POSTILLON

En 1829, quand le grand mathématicien (Ampère), atteint des premiers symptômes d’une maladie de larynx, voyageait sur la route d’Hyères, où il allait chercher le repos et le soleil, assis au fond d’une calèche à côté de son fils qui l’accompagnait, il se chargeait volontiers de payer les postillons. Aux portes d’Avignon, dans ce pays déjà méridional, où le langage populaire se colore et s’accentue d’épithètes énergiques, André Ampère essayait laborieusement de régler ses frais de route ; mais d’un côté la distraction, de l’autre l’impatience, embrouillaient incessamment toutes ses additions.

L’affaire s’arrange enfin au gré de l’Avignonnais, qui reçoit son pourboire et dit d’un air de superbe dédain : « En voilà un mâtin qui n’est pas malin ! Où celui-là a-t-il appris à carculer ? »