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Page:Reclus - Étude sur les fleuves, 1859.djvu/28

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Si l’on draine les marécages, la masse des eaux s’élève lors des crues à une hauteur beaucoup plus considérable dans le lit du fleuve et inonde les campagnes. Mais les inondations deviennent de nouveaux régulateurs pour le débit des eaux, et cela par leur irrégularité même : la couche d’eau qui recouvre les champs est arrêtée par les inégalités du terrain et les massifs d’arbres ; ne pouvant suivre le courant du fleuve dans sa course impétueuse elle reste en arrière, comme un lac temporaire, jusqu’à ce qu’elle puisse revenir dans son lit naturel ; aussi les vagues d’inondation diminuent-elles toujours de hauteur à mesure qu’elles avancent vers la mer, et finissent-elles par disparaître complétement. La crue moyenne du Nil va sans cesse en décroissant d’Assouan où elle a 9 mètres de hauteur, jusqu’à Rosette et à Damiette, où elle n’atteint guère à plus d’un mètre. Il en est de même pour tous les autres fleuves. Les inondations causent souvent de grands désastres, mais le plus souvent parce qu’on a augmenté leurs effets destructeurs par des travaux entrepris sans de larges vues d’ensemble, par des levées, digues ou empierrements. En les utilisant, en les réglementant, l’homme pourrait les faire travailler à son profit, comme de puissants agents pour la culture du sol ; mais là même où elles fouillent le terrain, arrachent les arbres, emportent les maisons, elles déposent la terre fine qu’elles portaient en suspension, et renouvellent par leurs alluvions la couche de terre végétale. Le ravage est bientôt réparé, mais le mélange des terres opéré par leur moyen produit ses bons résultats pendant de longues années. La masse d’eau que roule le Nil pendant les grandes