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Page:Reclus - Étude sur les fleuves, 1859.djvu/36

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fleuve, brisant ses digues, a quitté son lit pour se diriger, comme autrefois, vers le golfe de Petcheli à 350 kilomètres au nord de l’embouchure marquée sur les cartes.

L’élévation du cours inférieur des fleuves au-dessus de la surface des plaines environnantes explique de la manière la plus simple les déplacements continuels des bouches du delta ; qu’une brèche se forme dans la digue latérale, aussitôt une partie considérable de l’eau du fleuve s’échappe par cette ouverture et descend vers la mer par un nouveau lit qu’elle se creuse peu à peu à travers les terres basses, les marais et les lagunes du delta. C’est ainsi que les fleuves dont l’économie n’a pas été modifiée par le travail de l’homme ont des embouchures changeantes, qui se promènent à travers le delta et déposent leurs sédiments dans les lagunes de manière à hausser uniformément le terrain et à le mettre partout au niveau des grandes inondations. Ce travail d’exhaussement général et uniforme du sol est singulièrement aidé par les barres et les cordons de sable que la mer accumule à l’entrée même des embouchures et tout autour du littoral, forçant ainsi le fleuve à s’épandre latéralement et à combler de ses alluvions les lagunes comprises entre deux bras du fleuve et le cordon littoral. Aussi le nombre et la direction des embouchures d’un fleuve travailleur changent-ils constamment, même dans la période historique : les sept fameuses bouches du Nil n’existent plus, et les deux qui existent encore, celle de Rosette et de Damiette, paraîtraient, d’après le témoignage d’Hérodote, avoir été creusées de main d’homme.

La nature erratique des fleuves dans leur partie in-