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Page:Reclus - Étude sur les fleuves, 1859.djvu/6

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qui lui étaient superposées s’affaissent à l’endroit qu’elle vient de quitter ; sous l’influence de la chaleur terrestre, la nouvelle couche devient à son tour molle et fondante, et descend à la suite de la première. Ainsi, bien que les orages et les tourbillons apportent sans cesse de la neige sur les sommets, la masse entière reste toujours à peu près la même, et perd par la surface inférieure autant qu’elle gagne par la surface d’en haut.

À mesure que, sollicité par son propre poids, le névé descend dans les gorges étroites des montagnes, les couches superficielles de la neige exposées aux rayons du soleil, fondent çà et là et forment de petits filets d’eau qui pénètrent à travers l’énorme masse qu’elles recouvrent ; mais là, ces filets d’eau exposés à un froid intense, se congèlent de nouveau et deviennent des veines de glace du plus bel azur ; les quelques flaques d’eau produites çà et là pendant le jour par les rayons ardents du soleil se transforment également en glace pendant les froides nuits ; c’est ainsi que peu à peu, par une succession de fontes et de congélations, la neige se change en glace bleue et transparente.

Le glacier est un véritable fleuve, bien que ses vagues solidifiées n’avancent qu’avec une lenteur séculaire. Encaissé entre deux flancs abrupts comme entre deux rives, sa surface est hérissée de véritables flots partout où de grandes pierres l’ont garantie des rayons du soleil ; et ces pierres elles-mêmes vont à la dérive dans le courant du glacier, comme les troncs d’arbres que charrient les grands fleuves.