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LES ANIMAUX DE LA MONTAGNE.

plaisir de savoir que le loup, cet être odieux, est un animal des grandes plaines. La destruction des forêts natales et le nombre croissant des chasseurs l’ont forcé à se réfugier dans les gorges des hauteurs, mais il n’en est pas moins un intrus ; il est fait pour fournir d’une traite des courses de cinquante lieues à travers les steppes, non pour escalader les pentes de rochers. L’animal que la forme de son corps et l’élasticité de ses muscles rendent le plus propre à bondir de roche en roche, à franchir les crevasses, c’est le gracieux chamois, l’antilope de nos contrées. Voilà le véritable habitant de la montagne ! Aucun précipice ne l’effraye, aucune pente de neige ne le rebute ; il gravit en quelques bonds des escarpements vertigineux où l’homme le plus avide de chasse n’ose se hasarder ; il s’élance d’un saut sur des pointes moins larges que ses quatre pieds, réunis en un seul support ; c’est bien un animal de terre, mais on le croirait ailé. D’ailleurs, il est doux et sociable ; il aimerait à se mêler à nos troupeaux de chèvres et de brebis ; peu d’efforts suffiraient sans doute pour l’ajouter