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Page:Reclus - Histoire d’un ruisseau.djvu/283

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ici l’on effleure le gazon des berges, plus loin on rase les troncs d’un saule ; on passe de l’avenue toute noire d’ombre à la nappe pailletée de la lumière qui tombe en pluie à travers le feuillage. Et puis, ne fait-on pas corps avec le bateau, de manière à former avec lui comme un étrange animal, à la fois homme et dauphin ? De ses longues rames, semblable à de puissantes nageoires, on creuse des remous de chaque côté de la barque, on fait ruisseler les gouttes en perles à la surface de l’eau ; à sa guise, on ouvre le flot en sillons écumeux, et derrière soi on laisse un long sillage où vibre la lumière en lignes serpentines.

Malheureusement, sur le ruisseau les embarcations sont rares. À peine si des bateaux à une ou deux rames se mirent dans les bassins où les eaux s’accumulent avant de plonger sous les roues des usines et de mettre en mouvement meules et engrenages. Ailleurs, un vieux batelet, attaché par une chaîne à un pieu de la rive, est presque tou-