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Page:Reclus - Histoire d’un ruisseau.djvu/297

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la scie qui doit les dépecer en poutrelles et en planches ; l’eau manque dans le ruisseau, et malgré toute l’ingéniosité et la force des travailleurs, ils ne peuvent parvenir à faire flotter les lourdes masses, qui s’arrêtent çà et là sur les bancs de galets et sur les pointes de rocher. Ils sont obligés d’attendre les crues, qui remettent à flot tous les troncs échoués ; mais alors ceux-ci, emportés quelquefois trop tôt et trop vite, dépassent les berges où on les attend et vont au loin courir le monde, en dépit des ouvriers qui les attendaient au passage. Au débouché des rivières qui descendent des Apennins dans la Méditerranée, des multitudes de sapins, tout à coup surpris par les inondations, vont s’égarer ainsi dans la mer et y former des brisants mobiles, que le marin étranger prend de loin pour des écueils. Les bateliers, qui s’élancent à la poursuite des troncs échappés, vont les pêcher comme des cachalots, et les ramènent attachés à l’arrière de leur barque.