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Page:Reclus - Histoire d’un ruisseau.djvu/38

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reviendra que pendant la saison des pluies. Comment s’étonner alors que sa pensée, toujours obsédée de la vision des sources, toujours tendue vers l’image des eaux, les lui fasse apparaître soudain ? Le mirage n’est pas seulement, ainsi que le dit la physique moderne, une illusion du regard produite par la réfraction des rayons du soleil à travers un milieu inégalement échauffé, c’est aussi bien souvent une hallucination du voyageur altéré. Pour lui le comble du bonheur serait de voir s’étendre devant lui un lac d’eau fraîche dans lequel il pourrait en même temps se plonger et s’abreuver, et telle est l’intensité de son désir qu’elle transforme son rêve en une image visible. Le beau lac que sa pensée lui dépeint incessamment, ne le voilà-t-il pas au loin qui réfléchit la lumière du soleil et développe à perte de vue ses gracieux rivages ombragés de palmiers ? Dans quelques minutes, il s’y baignera voluptueusement, et ne pouvant jouir de la réalité, il jouit moins de l’illusion.