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Page:Reclus - La Commune de Paris au jour le jour.djvu/194

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journal de la commune

Le citoyen Raoul Rigault : Quand on n’a pas vu le dossier d’un homme emprisonné, on peut se laisser attendrir par ses paroles, par des questions de famille, d’humanité et l’aider à communiquer au dehors.

Le citoyen Vermorel : Citoyens, je crois qu’au point de vue de la question de principe, le secret ne peut être maintenu ; mais d’un autre côté, si vous arrêtez quelqu’un au point de vue politique, il est évident que c’est un ennemi que vous arrêtez ; or, si vous supprimez le secret, comment voulez-vous retrouver ses complices ?

Quand j’ai protesté contre le secret, sous l’Empire, c’est que j’étais détenu arbitrairement ; mais je ne crois pas que quelqu’un ait jamais demandé la suppression absolue du secret ; car, alors, l’instruction devient impossible. D’un autre côté, je crois que vous devez à l’accusé mis au secret une instruction immédiate, un contrôle. On ne doit pas laisser cette mesure à la discrétion arbitraire des délégués à la Sûreté générale. Je soutiens donc, le secret étant maintenu, que les membres de la Commune doivent aller visiter les prisons ; ce sera un moyen de contrôle.

Le citoyen Arthur Arnould : Je voudrais répondre au citoyen Vermorel. Je dirai que ses arguments sont absolument les mêmes que ceux qu’on présentait en faveur de la torture. Mais, sans la torture, nous ne pouvons, disaient les juges, jamais obtenir les aveux du coupable ! On a aboli la torture et on a obtenu l’aveu des accusés. Le citoyen Vermorel vous dit qu’il faut des garanties : mais vous serez obligés de vous en rapporter au juge qui sera chargé de l’instruction, c’est toujours l’arbitraire. Il n’y a qu’une façon juste de résoudre les questions : c’est d’en revenir aux principes. Il y a quelque chose de bien fâcheux, c’est quand on a tenu un drapeau toute sa vie, de changer la couleur de ce drapeau en arrivant au pouvoir. Il en est toujours de même, dit-on dans le public. Eh bien ! nous, républicains démocrates socialistes, nous ne devons pas nous servir des moyens dont se servaient les despotes.

L’ordre du jour est mis aux voix et adopté par 24 voix contre 17.

Les citoyens Raoul Rigault et Ferré donnent leur démission.