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journal de la commune

toujours et toujours avec une monotonie ennuyeuse. La pensée est molle, les expressions violentes, pas d’idées, mais quelles insultes ! Le critique s’aperçoit bientôt que le style, si style il y a, que le tour de phrase est celui d’un lettré, d’un lettré qui s’évertue à être ordurier et brutal, et qui y réussit, mais en restant ce qu’il a toujours été, pauvre d’intelligence. On me dit que son rédacteur, qui se prétend être un marchand de fourneaux, est un sieur Vermersch, l’ex-chroniqueur de je ne sais quel Mercure galant, moniteur des cocottes, un muscadin transformé subitement en vidangeur. Aux infections de l’égout, à une haleine infectée de vermouth et d’eau-de-vie, se mélangent encore de vagues odeurs de pommade et de mille fleurs. Je suis désolé, je suis honteux pour la Commune qu’elle ait un souteneur pareil. Il paraît qu’accueillie d’abord avec indifférence, cette feuille gagne tous les jours en influence, lue qu’elle est dans tous les corps de garde et fournissant des jurons tout prêts aux ivrognes, (car il en existe malheureusement toujours dans les bas-fonds des régiments fédérés). C’est elle qui a dénoncé Chaudey et l’a fait arrêter. C’est elle qui pousse le plus à l’exécution d’otages, qui vocifère sans cesse la colère, la vengeance et la déraison. Un régiment de Versaillais caserné dans Paris ferait à la longue moins de mal à la Commune que cet infect Père Duchêne ; mieux lui vaudrait que Le Gaulois et Le Figaro continuassent à s’imprimer à Paris !

Décidément, le journaliste est une des plus atroces plaies, un des plus grands malheurs, une des plus tristes hontes de la France. Nulle autre part, ils n’ont plus de talent, nulle autre part, ils ne font autant de mal, nulle autre part, ils ne sont plus ignorants et plus roués, plus frivoles, plus perfides, plus cruellement et plus odieusement calomniateurs. En Angleterre, en Allemagne et, même aux États-Unis, on ne sait pas mentir avec cet aplomb, avec cette ignoble désinvolture. Sans les journaux infâmes, l’Empire n’eût jamais réussi à lancer la France dans la criminelle expédition d’Allemagne, sans les mêmes journaux infâmes, nous eussions eu, sans doute, de grandes difficultés intérieures, mais non point notre abominable guerre civile.

J’ai nommé Le Gaulois. Dans quelques-uns de ses numéros qui me sont parvenus ce mois-ci (le transit est difficile),