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journal de la commune

sailles, c’est le Delenda Carthago de tous les discours, de toutes les conversations et de tous les articles. Il faut en finir et cela tout de suite… Autrement notre armée, notre administration, notre Assemblée elle-même pourraient chamberter, et tout cela pourrait finir par une victoire de la Commune — ou, ce qui est terrible à penser, pourrait amener une transaction équitable, l’appel au suffrage universel, et la nomination, par la France et Paris, de représentants nouveaux !

Un représentant de l’Algérie, honnête homme, vivement impressionné par la malice haineuse et entêtée du Chef du pouvoir exécutif, a donné sa démission au lendemain de la séance du 8 mai, « dans la douloureuse conviction que l’apaisement de la guerre civile est devenu impossible, malgré les aspirations des populations vers la conciliation ».

12 mai.

L’alimentation n’est pas la moindre affaire dans une ville assiégée. Nous en savons malheureusement quelque chose, nous qui avons passé naguère par les sinistres douleurs d’une infâme capitulation que nous avait imposée la famine, non moins que les lâches incapacités de Trochu. Cette fois-ci, les circonstances extraordinaires de l’investissement font que nous n’avons pas trop à nous plaindre. L’armée de Versailles fait ce qu’elle peut pour arrêter nos convois, mais heureusement, c’est-à-dire malheureusement, les Prussiens, qui nous investissent de l’autre côté, ont exigé sévèrement de M. Thiers que leurs communications restassent entièrement libres, et nous allons nous approvisionner sur leurs marchés ou plutôt aux mêmes marchés qu’eux. Nous avons eu quelques paniques au début, quand M. Thiers trompetait qu’il affamerait Paris, et déjà Le Gaulois, est-ce Le Gaulois ? et d’autres journaux de même farine racontaient qu’on faisait queue aux portes des boulangers et qu’on se donnait des coups de couteau devant les boucheries ; mais ces alarmes n’ont duré que quelques heures dans quelques quartiers. Aux Halles Centrales, les bancs sont restés approvisionnés de denrées de toute espèce : les verdures et légumes se vendent à des prix raisonnables. Il y a juste un mois, la Commune était en grand souci pour