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Page:Reclus - La Commune de Paris au jour le jour.djvu/312

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journal de la commune

longtemps, la Commune a aboli la liberté de la presse et confisqué tous les journaux qui lui étaient désagréables :

« La destruction de la maison de M. Thiers continue. Un grand nombre de personnes se tiennent sur la place Saint-Georges et dans les rues avoisinantes. Ces personnes sont attirées là par le bruit que les membres de la Commune qui ont voté et signé le décret de destruction devaient, pendant la durée des opérations, danser en rond autour de la maison, vêtus d’un pagne, armés d’un tomahawk, des plumes autour de la tête et un anneau dans le nez, en chantant leur chant de guerre. Cette nouvelle était absolument erronée, et nous sommes heureux de la démentir de la façon la plus absolue. Les membres de la Commune qui assistent à l’opération continuent de porter le costume des civilisés. »

A. Desonnaz.


Dimanche, 14 mai.

Le peuple est femme, il y a longtemps qu’on l’a dit ; le peuple de Paris est femme plus que tout autre, en un mot, c’est une Parisienne. Je l’aime, je l’admire, je l’ai approché de près, j’ai vécu avec lui, ses défauts, je les lui ai assez souvent reprochés, ne les connaissant que trop bien. Jamais je ne l’ai flatté, jamais je ne lui ai menti pour gagner ses bonnes grâces, je l’aime trop pour cela. Je le tenais en grande et haute estime, certes, mais aujourd’hui je suis heureux de le constater, après une année de terribles épreuves, il a dépassé, et bien au delà, mon attente. Depuis vingt-cinq siècles, l’histoire des deux sièges de Paris est digne de compter parmi les événements les plus cruels, les plus douloureux, les plus importants : la population est restée à la hauteur des événements, et même elle les domine. Prussiens et Bavarois la tiennent enfermée, les soudards germaniques, mâchonnant leurs pipes, repus de notre viande, abreuvés de nos meilleurs vins, contemplent nos désastres, l’œil rond et émerillonné, et accompagnent d’un éclat de rire bruyant et grossier, les coups des soudards versaillais trouant avec leurs boulets maisons et poitrines et, tout de même, malgré les défaites terribles que nous a fait subir l’étranger, malgré les cruelles humiliations qu’il nous inflige, Paris a toujours