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SIGURD.

Ne craignez point Sigurd, Sigurd est un infâme,
Il laissera refroidir sans remord,
Tout occupé de gagner une femme,
La cendre de son père mort.

Alors Sigurd frémit d’un horrible transport,
La colère d’Odin descendit sur son âme ;
Il gravit le rocher d’un pied rapide et fort,
Et sur ses pas ses guerriers accoururent.
Mais voilà qu’à leurs yeux mille géans parurent,
De ceux qui de l’enfer de glace et de frimats
Habitent loin du jour les désolés climats.
Pour le combat, l’un d’eux amène
Un animal étrange, à voix humaine
Et fort comme trente guerriers.
Soudain fut entendu le choc des boucliers.
Les haches étincellent,
Les flots de sang ruissellent,
Les membres s’amoncellent
Aux cris des loups de l’air[1] ;
Les armures se fendent,
Les coups pesans descendent
Sur les casques de fer ;
Des cuirasses brisées,
Les têtes divisées
Roulent jusqu’à la mer.
Sigurd combat aux lueurs de l’éclair :
Contre son front des oiseaux de ténèbres
Venaient heurter leur vol sans bruit ;
Le monstre l’appelait avec des cris funèbres :
À travers le sang et la nuit,
Sigurd s’élance et le poursuit ;
Mais le fer ne saurait l’atteindre,
Et le héros commence à craindre

  1. Les oiseaux de proie.