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SIGURD.

Dévorant ses maux dans son âme,
Se pencha sur Sigurd mort ; son œil fut sans pleur,
Elle ne tordit pas ses mains dans sa douleur
Comme aurait fait une autre femme.

On vit auprès d’Hilda les Iarles accourir,
Qui, pour la consoler, doucement lui parlèrent ;
Mais leurs propos point ne la consolèrent ;
Toujours ses pleurs coulèrent ;
Toujours elle voulait mourir.

Puis, des Iarles puissans les femmes et les mères
S’en furent vers Hilda toutes brillantes d’or,
Et chacune conta ses pertes bien amères :
Hilda ne put pleurer encor.

D’abord parla Gisla, la vénérable aïeule,
Elle dit : — Mes malheurs sont les plus grands de tous ;
J’ai perdu quatre fils, trois filles, deux époux,
Et maintenant je reste seule.

Hilda ne put donner de larmes à son sort,
Tant son âme était oppressée,
Tant l’accablait cette pensée :
Sigurd est mort ! Sigurd est mort !

Giafloga dit : — J’ai vu les fils de mes entrailles,
Mes douze fils tomber sur les champs de batailles,
Mon père et mon époux mourir le même jour,
Et de douleur ma mère expirer à son tour ;
Et de tous je menai seule les funérailles.
Hélas ! un an suffit pour me ravir
Tout ce que j’aimais sur la terre,
Et puis je fus prise à la guerre ;
J’eus un maître, il fallut servir.
L’épouse de mon maître était jalouse et fière ;
Elle me maltraitait, moi, pauvre prisonnière.
Son langage, rude et hautain,
De mon cœur creusait la blessure.