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ROMANS DE LA TABLE RONDE.

Arthur fait une tout autre figure que dans les triades et dans les poésies des bardes. Ces contes me sont inconnus, mais d’après quelques traits que j’en ai vu citer, le roi Arthur que l’on y fait agir, serait un personnage très merveilleux, mais d’un merveilleux mythologique, plutôt que romanesque ou chevaleresque, et toujours dans le sens des anciennes idées, des anciennes traditions bretonnes.

Quoi qu’il en soit de ce point particulier qu’il ne dépend pas de moi d’éclaircir, voici le résultat que je crois pouvoir énoncer sur le rapport historique des triades et des poésies bretonnes avec les romans de la Table ronde.

1o Dans tout ce qu’elles ont d’ancien, de national et de vraiment traditionnel, les triades et les poésies dont il s’agit n’ont aucun rapport avec les romans en question, et n’ont pu en fournir ni la matière ni le type poétique.

2o Tout ce qui, dans ces mêmes triades, renferme une allusion positive à des romans de la Table ronde, est d’une date postérieure à ces romans, en suppose l’existence et la connaissance ; en est, non pas la source, mais, au contraire, la dérivation et la suite.

Il reste à savoir jusqu’à quel point l’examen des chroniques est favorable ou contraire à ce résultat de l’examen des triades relativement à la question établie. J’avertis d’abord que, par chroniques bretonnes, j’entends principalement celle de Geoffroi de Montmouth en latin, et sa traduction, ou paraphrase galloise par Map, chanoine d’Oxford, puisque ce sont les deux monumens où la plupart des érudits se sont accordés à voir la source première des romans de la Table ronde.

J’ai déjà dit que la chronique de Geoffroi de Montmouth parut en 1138. Walter Map nous apprend lui-même que ce fut dans sa vieillesse qu’il traduisit ou paraphrasa en gallois cette chronique de Geoffroi ; et comme il vécut jusqu’à la fin du douzième siècle, il s’ensuivrait que sa traduction ne peut pas être beaucoup plus ancienne que cette dernière époque. Mais je veux bien la supposer plus ancienne et la mettre vers le milieu du siècle.