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Page:Revue des Deux Mondes - 1832 - tome 8.djvu/618

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REVUE DES DEUX MONDES.

une si féconde persévérance, que nous renonçons presque à l’en réprimander. Sans plus l’importuner de conseils dont il tient si peu de compte, enfant gâté qu’il est des cabinets de lecture, nous l’y laisserons donc quelque jour jouir en paix de sa vogue. Si elle passe vite d’ailleurs, ce n’aura pas été la faute de notre officieuse critique.

Soyons-lui cependant cette fois encore de sévères et bienveillans Aristarques.

Demandons-lui pourquoi, par exemple, il persiste à ne rien achever ; car c’est en général le défaut de ces nouveaux contes comme celui de leurs aînés. Maître Cornélius et l’Auberge rouge commencent à merveille. L’auteur nous introduit convenablement dans ces deux histoires ; mais de ce riche et spacieux vestibule où il nous a fait entrer, nous voudrions monter aux appartemens ; après être demeurés si long-temps sur le seuil, nous voudrions le franchir ; nous voudrions voir le reste de la maison. Par malheur, l’architecte a oublié de la finir. Il n’y a qu’un vestibule.

Madame Firmiani, c’est toujours la femme de trente ans. L’artiste avait un jour dessiné sur la pierre un portrait de femme, spirituel, élégant et fin ; mais à force de les multiplier, voici que les épreuves qu’il nous en donne pâlissent et s’effacent singulièrement.

Le meilleur morceau du volume est assurément la Notice sur Louis Lambert. C’est un long et triste regard jeté vers l’enfance. Ce sont les touchans souvenirs d’une amitié de collége, racontés simplement et sans prétention. Il ne fallait ici ni fable, ni drame. Et tant mieux, dès qu’il ne s’agit point de composer, quand il n’est besoin que de laisser courir la plume, M. de Balzac est passé maître, il est sur son terrain, et vous vous serez certes lassé de le lire, avant qu’il se soit lassé d’écrire.

Que si vous me demandez maintenant où est la philosophie de ces nouveaux contes, je vous dirai avec candeur tout ce que j’en crois savoir. M. de Balzac publie diverses séries de contes. Ce sont successivement et tour à tour des contes fantastiques, drolatiques et philosophiques. Les avant-derniers étaient drolatiques ; voilà sans doute pourquoi ceux-ci sont philosophiques.


DE L’ESPRIT ET DE LA CRITIQUE LITTÉRAIRES CHEZ LES PEUPLES ANCIENS ET MODERNES, PAR M. THÉRY, PROVISEUR AU COLLÉGE ROYAL DE VERSAILLES[1].

C’est un livre plein d’instruction et de conscience que celui de M. Théry. Il se place dès l’abord au point de vue platonicien ou idéal,

  1. 2 vol. in-8o, chez Hachette, rue Pierre-Sarrazin, no 12.