Page:Revue des Deux Mondes - 1833 - tome 3.djvu/115

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
109
MÉLANGES.

l’appareil natatoire le mieux conditionné, on ne conçoit guère comment ils auraient pu en faire usage dans les eaux si violemment agitées. Il devenait très probable qu’ils passaient, cachés sous des pierres, tout le temps qui séparait les deux basses mers, et c’est ce que des observations ultérieures confirmèrent pleinement ; mais il restait à concevoir comment, restant plongés si long-temps sous l’eau et à une profondeur souvent de plus de trente pieds, ils trouvaient le moyen de respirer. Quelques-uns, sans doute, pouvaient trouver, dans les petites cavités des pierres sous lesquelles ils se réfugient, des bulles d’air engagées, et ces cavités auraient été pour eux ce qu’est pour la larve du potamogeton la coque soyeuse qu’elle a soin de se filer. Il était difficile d’ailleurs de supposer que ce fût le cas général ; le retour de la mer, en effet, est si prompt, que les insectes ne peuvent guère avoir le temps de chercher ces réservoirs d’air, toujours peu communs, et il était presque nécessaire qu’ils emportassent cet air avec eux, au moment où ils disparaissaient sous les eaux ; c’est en effet ce que des observations ultérieures firent reconnaître à M. Audouin.

Si l’on examine l’insecte à l’œil nu et mieux encore à l’aide d’une loupe, on voit la surface de ses élytres, sa tête, ses antennes, ses pattes, tout son corps enfin, couverts de poils, dont plusieurs atteignent une grande longueur. Chacun de ces poils, quand on plonge subitement l’insecte dans l’eau, se montre revêtu d’une mince couche d’air. Cet air se réunit d’abord en petites globules, puis en une bulle unique qui entoure le corps de toutes parts, et ne s’en détache point par les mouvemens que se donne l’animal en courant sur le fond ou les parois du vase.

Ce qui a lieu dans cette expérience se produit certainement lorsque la mer vient submerger notre insecte. Toujours il emporte avec lui une petite couche d’air, et quand il se cache sous une pierre, il s’y trouve momentanément dans les conditions des insectes placés librement dans l’air. Toutefois, on conçoit bien que cette quantité d’air si petite serait promptement viciée par la respiration, et deviendrait impropre à entretenir la vie, si ses élémens ne se renouvelaient pas. Mais il en est de cet air extérieur comme de celui qui se trouve à l’intérieur des branchies des insectes aquatiques proprement dits ; il se répare aux dépens de l’air dissous dans l’eau ambiante, et le renouvellement s’opère avec d’autant plus de facilité, que l’eau est plus agitée.

M. Audouin a reconnu que l’insecte dont nous venons de parler appartient à la famille des carabiques, au genre blemus, et il le distingue par l’épithète de fulvescens, qui rappelle sa couleur.

M. Audouin pense que plusieurs espèces de coléoptères, du genre elims, que l’on trouve sous les pierres au fond des ruisseaux, et que jamais on