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d’actrice a exclue de ce théâtre, et qui recueille, en ce moment, des succès en province. MM. Melesville et Bayart, les auteurs de ce mélodrame, n’ont pas épargné les grosses couleurs, et ils ont chargé la pauvre petite Brinvilliers de plus de crimes encore qu’elle n’en a commis. Dans ce drame, la Brinvilliers empoisonne jusqu’à madame Henriette d’Angleterre, qu’on voit mourir sur la scène assistée de Bossuet. Le malheureux Bossuet expie cruellement les honneurs dont sa vie fut remplie, et quand Labruyère le nommait par anticipation « un père de l’Église, » il ne se doutait pas que la postérité lui ferait payer cette flatterie en promenant son héros sur les planches sales d’un théâtre des boulevards. Pour Bossuet, il avait en quelque sorte prévu son sort en commençant l’oraison funèbre de madame Henriette par ces mots prophétiques : « Tout n’est que vanité ! »

L’Opéra nous a donné un spectacle d’un autre genre. Vendredi dernier, M. Nestor Roqueplan, rédacteur en chef du Figaro, y fut abordé par M. le colonel Gallois, qui lui demanda raison d’un article qu’il trouvait injurieux pour lui et ses amis politiques. Une discussion s’engagea, dans laquelle M. Gallois arracha le ruban rouge que M. Roqueplan portait à sa boutonnière. Quelques coups de canne furent, dit-on, lancés par M. Roqueplan à son adversaire. Un duel eut lieu le lendemain : M. Gallois, blessé au genou, et M. Roqueplan, touché au visage, à la main et à la poitrine par l’épée du colonel, furent séparés par leurs témoins. Le soir même, M. Roqueplan se montrait à l’Opéra, la main enveloppée dans un mouchoir, et le visage balafré par un large emplâtre. Un second duel, occasioné par la même querelle, a eu lieu entre M. Guinard, l’ami de M. Cavaignac, et M. Léon Pillet, rédacteur en chef du Journal de Paris, autre feuille ministérielle. M. Pillet, blessé à la gorge, s’est déclaré satisfait. On parle encore de quelques autres rencontres qui doivent avoir lieu. Quelques jours auparavant, M. de Trobriant, ancien officier de la garde royale, avait tué en duel M. Pélicier, chef de bureau du ministère de l’intérieur, qui avait vivement blâmé une pièce de vers politique dont M. de Trobriant est l’auteur. À Londres, quand souffle un certain vent d’est, un grand nombre d’Anglais se pendent ; quel vent meurtrier a donc soufflé à Paris pendant cette quinzaine, signalée par tant de combats ?


ESSAI SUR L’HISTOIRE LITTÉRAIRE DU MOYEN AGE, PAR M. CHARPENTIER, PROFESSEUR DE RHÉTORIQUE AU COLLÈGE DE SAINT-LOUIS.[1]


C’est un vaste et vague sujet que l’histoire littéraire du moyen âge, un océan dont les rives sont à peine déterminées. Jusqu’ici, quoi qu’on ait fait,

  1. Un vol.  in-8o, 1833, chez Maire Nyon.