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Page:Revue des Deux Mondes - 1833 - tome 3.djvu/589

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LA DUCHESSE DE BERRY AU CHÂTEAU DE NANTES.

moi, allez, général. — En disant ces dernières paroles, elle se releva et se promena comme un homme, et les mains derrière le dos. Au bout d’un instant, elle s’arrêta tout court et reprit :

— À propos, général, parmi les effets que vous avez bien voulu vous charger de m’envoyer, et que j’ai reçus, il devait y avoir une boîte pleine de bonbons, et elle ne s’y est pas trouvée.

Je tirai la boîte de ma poche, et je l’ouvris

— Ah ! dit Madame, elle est vide ; — au fait, des bonbons, cela se mange.

— Quels sont ceux que Madame préfère, j’aurai l’honneur de lui en envoyer ?

— Du chocolat au rouleau avec des dragées dessus.

— Alors Madame permet ?…

— Général, des bonbons, — cela s’accepte.

Il était six heures et demie, madame allait dîner ; je pris congé d’elle. — À demain, général, me dit-elle avec une gaîté toute d’enfant, et n’oubliez pas mes bonbons surtout.

Je sortis.

À neuf heures, le général d’Erlon prit la peine de passer lui-même chez moi pour me dire que l’on croyait être certain de la présence du général Bourmont à la Chaslière. Si cela est, général, répondis-je, je vais prendre avec moi cinquante chevaux, et demain matin M. de Bourmont sera ici.

À onze heures j’étais en route.

À minuit on réveillait Madame, mademoiselle Stylite et M. de Ménars. Ils montèrent dans une voiture qui les conduisit à la Fosse, où les attendait un bateau à vapeur, sur lequel se trouvaient déjà l’adjoint du maire de Nantes, MM. Robineau de Bougon, colonel de la garde nationale ; Rocher, porte-étendard de l’escadron d’artillerie de la même garde ; Chousserie, colonel de gendarmerie ; Ferdinand Petit-Pierre, adjudant de la place de Nantes, et Joly, commissaire de police de Paris. Madame était accompagnée, en se rendant au bateau, de M. le général d’Erlon, de M. Ferdinand Favre et de M. Maurice Duval. En descendant de voiture, elle me chercha des yeux, et ne me voyant pas, elle demanda où j’étais. On lui répondit que j’étais en expédition. — Allons, dit-elle, encore une gentillesse de plus. — M. le général commandant la division, M. le préfet et M. le maire de Nantes devaient accompagner Madame jusqu’à Saint-Nazaire, et ne la quitter qu’après son embarquement sur le brick la Capricieuse.

En mettant le pied sur le bateau, Madame s’informa si M. Guibourg la suivrait ; le préfet lui répondit que la chose était impossible. Alors elle demanda une plume et de l’encre, et lui écrivit le billet suivant :