Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1840 - tome 22.djvu/240

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
236
REVUE DES DEUX MONDES.

1er mars 1836. Le dernier jour de la session, un membre avait proposé la levée du siége de Bejar ; mais il n’avait pu faire prendre son avis en considération, et, loin de là, le gouvernement promit 20 dollars par mois à tous les volontaires qui resteraient sous les drapeaux jusqu’après la prise de la ville.

L’armée avait besoin d’un pareil encouragement, et même, sans un hasard heureux et l’énergie d’un homme, le siége eût été abandonné. Les volontaires s’étaient rendus à l’armée comme à une partie de plaisir ou de chasse qui ne durerait que très peu de jours, sans provisions suffisantes et sans vêtemens d’hiver. Le terme de leur engagement étant très court, ils songèrent à retourner chez eux dès qu’ils virent arriver la saison des pluies, et, malgré tous les efforts des officiers pour les retenir, un grand nombre se retiraient journellement. On leur promit l’assaut pour le 2 décembre ; mais le nouveau chef, le colonel Burleson, jugea probablement cette résolution trop hasardeuse, et annonça la retraite sur Gonzalès pour le 4 au soir. Tout se préparait donc pour la levée du siége, quand un déserteur arriva au camp des Texiens. Cet homme dit aux officiers que les soldats mexicains qui défendaient la place étaient pour la plupart ennemis de la dernière révolution, et fort peu disposés à se battre en faveur de Santa Anna ; que la prise de la ville n’offrirait pas de difficultés si on voulait la tenter. Les plus braves parmi les Texiens étaient au désespoir de lever le siége ; ils résolurent de courir les chances d’un dernier effort, et choisirent pour leur chef un des héros de cette guerre, l’intrépide Milam. Milam, dont mainte aventure brillante avait popularisé le nom dans le Texas, était en prison à Mexico, quand la lutte avait commencé. Aussitôt il avait brisé ses fers, et à travers mille dangers il avait rejoint ses compatriotes devant Goliad. Sa valeur et son habileté inspiraient à ses compagnons une confiance sans bornes. Cette fois encore il la justifia, et ce fut au prix de sa vie. Le 5 décembre, au point du jour, Milam, ayant réussi à distraire l’attention de l’ennemi par une feinte attaque sur la citadelle, pénètre dans la ville avec ses braves volontaires ; mais alors les difficultés commencent, et les périls de l’entreprise se manifestent à chaque pas. Le général Cos avait profité de la disposition des lieux et de quelques grands bâtimens en pierre, pour se retrancher fortement à l’intérieur. Toutes les avenues de la place étaient barricadées, coupées de fossés, garnies de canons. Il avait mis une pièce d’artillerie sur la plate-forme d’une vieille église, qui commandait toute la ville, et le feu de la citadelle pouvait appuyer la résistance de la ville elle-même. Cependant les