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LES MISSISSIPIENS.

LOUISE.

Un peu… maman…

JULIE.

Dites toute la vérité ; votre mère veut votre bonheur, mon enfant. George m’a demandé votre main (Louise tressaille), et j’ai promis de la lui accorder, si je puis m’assurer que son affection pour vous est sincère.

LOUISE, émue.

Oh ! s’il vous l’a dit, maman, j’en suis bien sûre.

JULIE.

Mais comment le savez-vous ? Il vous l’a donc dit ?

LOUISE.

Jamais, maman.

JULIE.

Louise, vous me trompez ; vous ne m’aimez donc pas ?

LOUISE.

Oh ! ma bonne mère, aimez-moi, car je ne demande qu’à vous chérir de toute mon ame.

JULIE, la caressant.

Eh bien ! ma fille, il t’a parlé d’amour ?

LOUISE.

Eh bien ! maman, je vous le jure, il ne m’en a jamais dit un mot.

JULIE.

Mais il t’a parlé de mariage, au moins ?

LOUISE.

Pas davantage. Il me disait toujours qu’il avait horreur du mariage, au contraire, et qu’il ne connaissait pas de lien plus avili par l’ambition et la cupidité.

JULIE, à part.

Ceci est pour moi. (Haut.) Et lorsqu’il t’a enlevée, où t’a-t-il conduite ?

LOUISE.

Oh ! il ne m’a pas enlevée ; c’est moi qui voulais me tuer.

JULIE.

Par amour pour lui ?

LOUISE.

Je ne le connaissais seulement pas ! Mais c’est que je m’imaginais !… oh ! pardonnez-moi, maman, j’avais bien tort ; car vous êtes si bonne pour moi !… je m’imaginais que vous ne m’aimiez pas.

JULIE.

Et lui, il t’a persuadé qu’il t’aimait ?

LOUISE.

Oh ! maman ! si vous ne me disiez pas qu’il vous a demandé ma main, je ne le croirais pas, car il m’a toujours traitée comme un enfant. Au couvent, il