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Page:Revue des Deux Mondes - 1847 - tome 19.djvu/111

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Il n’est pas besoin d’insister sur l’influence que donne au pouvoir la disposition de tant de places, toutes assez lucratives pour que l’on soit certain d’y faire, en peu d’années, une fortune considérable et honorablement acquise. Rien d’obligatoire dans le nombre des personnes qui doivent former le conseil responsable de la couronne ; on peut agir, à chaque occasion, en raison des nécessités du moment. Dans la pratique, quel avantage n’y a-t-il pas à pouvoir étendre ou restreindre la composition d’un cabinet, de pouvoir y faire entrer ou en tenir éloignés certains fonctionnaires, suivant qu’ils ont une valeur politique ou seulement une capacité spéciale ! Peut-être la vanité est-elle trop éveillée chez nous pour qu’un homme pût ainsi se rendre justice à lui-même et consentir à n’être pas tout ce qu’a été son prédécesseur. Le nombre de places octroyées en Angleterre par le ministre principal est peut-être bien considérable, et convient mieux à cette société aristocratique, qu’à notre monarchie démocratique. Cependant il y a du champ entre ce luxe d’emplois publics qui de l’autre côté du détroit font partie de l’héritage ministériel et le maigre patrimoine dont un chef de parti peut disposer en France, quand il arrive aux affaires. Qu’on nous permette de ne pas qualifier d’abus ces sinécures au conseil occupées par des hommes influeras qui souvent sont âgés et n’ont pas l’activité nécessaire pour la conduite quotidienne des affaires, mais qui font profiter le cabinet de la maturité de leur sagesse, de l’autorité de leur expérience, et qui ont le temps de réfléchir, de préparer les grandes questions.

Nous ne prétendons rien indiquer d’une façon précise sur ce qu’il conviendrait de faire d’analogue en France ; nous ne voulons que mettre en avant quelques idées, qui, nous le croyons, feront un jour leur chemin, non point parce qu’elles auront été souvent présentées, mais parce qu’elles s’imposeront d’elles-mêmes. Nous savons quelle est la force des habitudes dans notre pays, qui en Europe passe pour entreprenant et novateur ; nous n’ignorons pas combien, malgré l’habileté pratique dont nous nous vantons, nous sommes encore esclaves des formes anciennement admises, des précéderas depuis long-temps établis. Combien de fois n’avons-nous pas entendu dire, non point à des esprits chimériques, mais à des hommes doués de quelque autorité en ces matières, qu’il y aurait tout avantage à séparer le ministère de la marine du ministère des colonies, qu’aujourd’hui surtout où l’émancipation ne pouvait plus long-temps tarder, il était nécessaire de placer ces possessions lointaines sous la main d’un ministre spécial chargé de les préparer à la grande transformation sociale qui leur est réservée ! On a souvent aussi réclamé la création d’un ministère de l’agriculture détaché du ministère du commerce, et qui à son tour prendrait aux finances la direction des eaux et forêts. Enfin une commission de la