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Si dit, et, se levants, ès mains sa mère amie
Il met double hanap, et à tant l’arainie[1] :
« Bien que peinée, endure, ma mère, et tien ton cœur,
« Que ne sois, tu que j’aime, sous mes yeux maubaillie[2] ;
« Lors t’aider ne pourroie, jà soit qu’aurai douleur ;
« Car on résiste mal à l’Olympe seigneur.
« Et jà quand je tentai de te porter aïe,
« Me prit au pied et jus lança du seuil divin.
« Dévalai[3] tout le jour, si qu’à soleil déclin[4]
« Je tombai dans Lemnos, ayants mout peu de vie ;
« Gisant me recueillirent bientôt gens de Sintie[5]. »

XLIX.


Si dit ; à lui sourit et reçut souriants
Le hanap présenté la Déesse aux bras blancs.
Ore il[6], aux autres Dieux, à droite commençants,
Verse le dou nectar. qu’en l’urne il va puisants.
Un ris inextinguibles se lève ès Dieux joyants,
Quand Vulcains par la salle est véüs clopinants.

L.


Si il[7], le jour entier jusqu’à soleil déclin,
Festinent, et ne manque ne la parts au festin,
Ne la lyre tant belle qu’Apollons tient en main,
Ne les chanson des Muses se répondants mout bien.


LI.


Quand jus est du soleil la splendide clartés,
Il s’en vont pour dormir aux logis séparés
Qu’a d’un très grand savoir à chacun élevés
Li renommés Vulcains, boiteux des deux côtés.
Li Dieux qui lance éclairs est à son lit allés
Où, quand vient doux sommeils, sent[8] être reposés ;
Là se git ; et Junons à trône d’or, delés[9].


É. LITTRÉ,

De l’Académie des inscriptions et Belles-Lettres.

  1. Et, cela fait, il lui adresse la parole. Arainier est une forme contracte du verbe arraisonner. Lai de Melion, p. 54 : « Ses hommes en a araîniés. »
  2. Maltraitée, mise à mal. Sois, écrit soies, était de deux syllabes ; cependant on le trouve aussi monosyllabe comme aujourd’hui. Chron. de Norm., v. 1512 : « Et si en seies séurs et fix. »
  3. Je roulai en bas.
  4. Au déclin du soleil. Berthe, XXXVI : « Li jours va à déclin, si approche la nuits. »
  5. Nom de peuple.
  6. Ore lui
  7. Ainsi eux.
  8. Il a coutume ; du verbe souloir, encore employé par La Fontaine.
  9. A côté. Roncisvals, p. 3 : « Chacuns ira au règne où il fut nés, ou à Etampes ou à Paris delés. » Travels of Charl.,v. 401 : « Li rois Hugon li forz et sa moillier delez. »