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Page:Revue des Deux Mondes - 1847 - tome 19.djvu/65

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VALPARAISON


ET


LA SOCIETE CHILIENNE.




I.

Si l’on n’a pas connu les fatigues, les ennuis de la traversée du cap Horn, il faut renoncer à comprendre le charme mystérieux qui s’attache, pour le voyageur impatient et attristé, à ce doux nom de Valparaiso, sans cesse répété comme une consolation, comme un espoir, à travers les périlleux hasards d’une navigation contrariée par les vents. Que de fois, battus par une mer furibonde, nous mesurâmes tristement sur la carte marine l’espace qui nous séparait du port ! Que de semaines froides et tourmentées nous passâmes dans cette pénible attente ! Toujours d’étourdissans roulis, toujours un ciel morne où des nuages gris fuyaient comme un troupeau effaré sous le fouet du vent. Enfin le changement de latitude vint apporter quelque soulagement à cette souffrance quotidienne. La mer cessa de battre en brèche les flancs du navire, les jours redevinrent tièdes et limpides, les nuits reprirent leur parure d’étoiles. Un soir, dans les profondeurs de l’horizon, nous vîmes apparaître la silhouette incertaine d’une côte ; bientôt un phare montra dans la brume sa lueur sanglante, et, quand vint le jour, une vigie signala Valparaiso sous un rayon de soleil.

Il faut le dire, nous éprouvâmes ici l’une de ces déceptions qui ne font guère défaut durant un long voyage. Dans notre mémoire, plus