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avait connu dès son enfance William Pitt, moins âgé que lui de deux ans. Plus tard, cette liaison était devenue une amitié véritable. Pitt, déjà parvenu, malgré sa grande jeunesse, au gouvernement de l’Angleterre, désirait naturellement s’entourer d’auxiliaires en qui il pût placer une entière confiance. Les élections de 1784, qui brisèrent la majorité organisée contre lui par la fameuse coalition, ouvrirent les portes de la chambre des communes à une génération nouvelle d’hommes politiques dévoués, pour la plupart, au vainqueur de Fox et de lord North. Addington, élu par le bourg de Devizes à la place de son beau-frère, qui s’était volontairement retiré, entra au parlement au moment même où il accomplissait sa vingt-septième année. Il avait mis peu d’ardeur à s’en préparer l’accès, il mit peu d’empressement à y prendre la parole. Il suivait attentivement toutes les délibérations, mais près de deux années s’écoulèrent avant qu’il pût se décider à entrer en lice avec les brillans et puissans orateurs qui figuraient alors sur les bancs de l’opposition comme sur ceux de la trésorerie. Une timidité qu’il ne surmonta jamais complètement ne lui permettait pas de se dissimuler combien il leur était inférieur. Pitt essayait vainement de lui inspirer plus de confiance ; pour le décider enfin à parler, il fallut qu’il lui en imposât, pour ainsi dire, l’obligation. A l’ouverture de la session de 1786, il le pria, suivant un usage particulier au parlement britannique, de seconder le député ministériel chargé de présenter le projet d’adresse. Addington, ainsi provoqué, ne recula pas devant cette épreuve : il réfuta les attaques dirigées contre le projet, et son discours obtint quelque succès. L’année suivante, il se hasarda encore à appuyer la proposition d’établir une taxe sur les chevaux, et cette fois aussi il fut écouté avec assez de faveur. Il ne semble pas, cependant, que ces marques d’approbation, qu’on exagérait à dessein pour l’encourager, aient pu vaincre sa répugnance à se produire en public, et, pendant les deux sessions qui suivirent, il garda un silence complet. Son nom ne figure pas dans les grands débats auxquels donna lieu la question de la régence, lorsque George III éprouva la première atteinte de sa terrible maladie.

Addington ne restait pourtant pas inactif. Il participait constamment aux travaux des comités, s’instruisant ainsi dans les détails des affaires proprement dites, et acquérant l’expérience des formes, des traditions, des procédés parlementaires, si compliqués et si multipliés chez nos voisins. Son aptitude remarquable à ce genre de travaux qui exigent, non pas sans doute une portée d’esprit très élevée, mais beaucoup d’application, de sens et de sagacité, lui procura peu à peu une grande considération, et, la présidence de la chambre des communes étant venue à vaquer dans l’été de 1789, Pitt n’eut pas de peine à diriger sur lui le choix de l’assemblée. L’opposition combattit faiblement une candidature dont personne ne contestait la parfaite convenance. Addington