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Page:Revue des Deux Mondes - 1848 - tome 22.djvu/229

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que l’on recommandait avant tout, c’était l’introduction des cotonnades de Manchester ! Le gouvernement de Calcutta répondit à celui de Madras dans les termes suivans :


« Le plan de lord Elphinstone est approuvé, savoir

« 1) Ouvrir des voies de communication ;

« 2) Faciliter par tous les moyens possibles les transactions commerciales, et établir à cet effet des foires et des marchés ;

« 3° Organiser une police semi-militaire.

« Si l’occasion se présentait d’entrer en discussion avec quelques chefs influens et bien disposés, il n’y aurait point d’imprudence à leur déclarer que le gouvernement anglais abhorre cette coutume (celle des sacrifices humains), et qu’il est déterminé à user du droit qu’il a de punir sévèrement tous ceux qui chercheraient à s’emparer des sujets de la Grande-Bretagne pour les immoler ; mais, pour le présent, il faut se borner à des tentatives graduelles. »


Ces tentatives, c’est-à-dire l’établissement des foires et des marchés, ont eu si peu de succès, qu’en mars 184 ! 4, le colonel Ouseley écrivait que ces pauvres victimes étaient immolées par centaines. Le colonel recommande l’emploi de la force et il offre de se mettre à la tête d’une expédition. « Il y a peu d’honneur et de gloire, dit-il, à acquérir dans ces forêts ; mais il est urgent de mettre un terme à des horreurs que l’on commet ouvertement à 100 ou 120 lieues de la capitale. » Un autre officier, M. Bannerman, fut assez heureux pour arracher une jeune fille des mains du bourreau au moment où le sacrifice sanglant allait être consommé. Quelques passages de son rapport méritent d’être cités. « Après avoir traversé, dit M. Bannerman, une forêt épaisse par un sentier étroit et difficile, nous arrivâmes au village avec les dernières lueurs du jour. Les Khonds ne se doutaient pas de notre approche, et ils furent pris à l’improviste. Les préparatifs de la cérémonie semblaient être terminés. Le hameau avait la forme d’un carré ; à l’entrée, on avait construit une clôture à jour, et, au milieu de la place, près d’une idole d’un travail grossier, s’élevait un mât d’à peu près quarante pieds de haut, au sommet duquel on avait placé une effigie qui représentait un oiseau couvert de plumes de paon[1]. Nous nous emparâmes du sacrificateur, mais les Khonds avaient pris l’alarme et ils fuyaient déjà vers la montagne. La victime, une jeune fille des plaines, me fut livrée après quelques débats, et j’entrai en communication avec quelques-uns des chefs et des anciens. J’essayai de leur représenter combien il était cruel et haïssable d’immoler ses semblables, et combien il était insensé de

  1. On sait que les Aztèques, avant de frapper la victime, plaçaient également des oiseaux en regard des images de leurs dieux. Nous croyons qu’il y a plus d’un rapprochement de ce genre à faire entre les offrandes et les cérémonies religieuses des Khonds et celles des anciens Mexicains.