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Ce dernier parti, composé en général de révolutionnaires ardens, et qui plus tard devait activement participer au mouvement socialiste de l’Europe, ne supportait qu’avec peine le joug d’O’Connell et du clergé ; à cette époque, il se prononça pour le système d’enseignement séculier. On sait quel trouble cette espèce d’insurrection contre sa royauté jeta dans les dernières années du vieil O’Connell.

Ce ne fut pas seulement parmi les laïques qu’il s’opéra une scission au sujet des nouveaux collèges ; l’épiscopat catholique lui-même se divisa. Le gouvernement anglais était, à cette époque, en assez bons termes avec la partie modérée de l’épiscopat irlandais, et même avec la cour de Rome. C’était le moment où sir Robert Peel venait de faire voter la dotation du séminaire de Maynooth, qui fut, bien plus encore que la réforme économique, la véritable cause de sa chute. Il pouvait donc se croire en droit de compter sur le concours d’une partie des évêques d’Irlande, et il savait, du reste, que, sans ce concours, ses projets n’auraient aucune chance de succès, car le clergé était le maître absolu du peuple. Toutefois, dès le début, les évêques lui posèrent des conditions inacceptables. Un de leurs considérans était ainsi formulé : « Les élèves catholiques romains ne peuvent suivre des cours d’histoire, de logique, de métaphysique, de philosophie morale, de géologie, d’anatomie, sans exposer leur foi ou leur moralité à des dangers imminens, à moins qu’un professeur catholique romain ne soit nommé à chacune de ces chaires. » Ils demandaient en outre qu’il fût formé un conseil dont feraient partie les évêques, et que le gouvernement donnât un salaire à des chapelains catholiques qui seraient nommés et révoqués par les évêques. À leur point de vue, les prélats irlandais avaient raison ; ils ne demandaient rien de plus que ce qu’avaient les évêques anglais dans les universités protestantes ; mais ils ruinaient par la base tout le système proposé par le gouvernement. Sir Robert Peel voulait établir un système d’enseignement neutre, mais on ne pouvait attendre de lui qu’il fondât des universités catholiques, quand il était le représentant officiel d’une religion d’état protestante. Déjà les presbytériens, qui forment un fort parti dans le nord de l’Irlande, déclaraient que, si les conditions des évêques étaient acceptées, ils interdiraient les académies à leurs coreligionnaires, et jamais d’ailleurs le parlement n’aurait sanctionné de pareilles mesures. Sir Robert Peel chercha une transaction ; il fut convenu que l’église catholique aurait une forte part de représentation dans le conseil académique ; il fut sous-entendu que, comme la majorité des étudians serait catholique, la majorité des professeurs le serait probablement aussi. Les deux partis extrêmes, sir Robert Inglis d’un côté et O’Connell de l’autre, se refusèrent à toute transaction ; mais les concessions du gouvernement furent provisoirement acceptées par la moitié des évêques. Ce fut à ce