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Pesth le 23 février et marcha à la rencontre des trois corps hongrois qui s’avançaient vers cette ville. Les deux armées se rencontrèrent le 26, entre deux et trois heures de l’après-midi, devant Kapolna, et se canonnèrent jusqu’au soir sans résultat apparent ; mais, le 27 au matin, Schlick, ayant, après un violent combat, emporté le village de Verpeleth, sur lequel s’appuyait la droite de l’armée hongroise, commença à la refouler sur son centre. Le prince fit alors avancer ses troupes contre le front des positions occupées par l’armée ennemie, et Dembinski, attaqué de front par le prince et de flanc par Schlick, fut forcé de retirer son armée jusqu’à Kerecsend, à trois mille pas en arrière de Kapolna. Le feu cessa sur les quatre heures. Nous n’eûmes que quatre cents hommes tués et blessés ; la moitié appartenait au corps de Schlick. Pendant la nuit qui suivit le combat, Dembinski se retira jusqu’à Mezö-Kövesd, à trois lieues en arrière de Kerecsend, et, le 28 au matin, il y rangea son armée dans une très forte position.

La bataille de Kapolna détermina l’ennemi à repasser la Theiss, et cependant, à partir de ce combat (27 février) jusqu’au 7 avril, les positions que nous prîmes dépendirent des mouvemens des Hongrois. Toutes nos opérations n’eurent qu’un seul but leur fermer la route de Pesth, sur laquelle ils pouvaient déborder par deux points, Hatvan ou Czegled ; elles n’aboutirent pourtant, après quelques semaines, qu’à un mouvement rétrograde sur Pesth. Au début de ces opérations, le corps du ban fut chargé de garder la position de Czegled, puis il dut, avec le reste de l’armée, se retirer vers Pesth : c’est l’histoire de ce corps pendant cette époque critique de la campagne que je me bornerai à retracer ici.

Au commencement de mars 1849, le ban Jellachich fut envoyé à Kecskemét pour occuper la droite de la position de notre armée et empêcher le général Vetter, qui avait succédé à Dembinski dans le commandement des Hongrois, de se porter sur Pesth par Czegled. Nous arrivâmes à Kecskemét le 13 mars. Kecskemét est un grand village de plus de quarante mille ames. Le soir, après la marche, je montai sur la tour de l’église : le soleil couchant éclairait de ses derniers rayons cet immense armas de maisons plates et basses jetées au milieu d’une plaine sans bornes ; çà et là, à de grandes distances, on apercevait à l’horizon quelques points blancs perdus dans l’espace comme des voiles sur l’océan ; aucun bruit de la terre ne montait jusqu’à moi. Je ne pouvais détacher mes yeux de ce spectacle grandiose. Au-dessous de moi, je distinguais à peine nos bataillons bivouaquant dans la campagne : cette armée, qui me semblait un monde, n’était qu’un point sur ces plaines infinies.

Pendant que nous occupions ces positions, Vetter, étant revenu occuper la rive gauche de la Theiss le 17 mars, menaçait de passer de