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réalistes de M. Courbet. Les tableaux de M. Courbet ont à nos yeux une très utile signification, c’est qu’ils montrent à nu, sans quintessence théorique, ce que c’est que le réalisme dans l’art, et ce n’est rien de séduisant assurément. Ce n’est point à nous, au surplus, d’aller plus loin dans cette analyse de l’exposition des œuvres d’art. Arrêtons-nous pour revenir à l’histoire politique.

Les incidens les plus sérieux, les plus propres à caractériser la situation générale de l’Europe, on les connaît d’après ce que nous disions sur les affairés d’Orient, qui ont été depuis quelques jours la préoccupation absorbante des cabinets et de tous ceux qui ont encore quelque souci des grands mouvemens politiques. Tout le monde en effet n’est-il point intéressé aux solutions qui peuvent se produire ? Au milieu de ces préoccupations de la question orientale, il y a pourtant un épisode qui a singulièrement frappé l’attention en ces quelques jours, et qui a été l’objet de plus d’un commentaire : c’est le voyage que le roi des Belges vient de faire en Allemagne. C’est pour le moment le grand événement de la Belgique, où retentit, comme on le pense et comme il est juste, l’écho des réceptions brillantes faites à son souverain. Le roi Léopold, en effet, a parcouru l’Allemagne avec son fils, le duc de Brabant ; il est allé à Berlin, à Vienne, à Dresde ; partout il a rencontré toute sorte de distinctions spéciales et de déférences de la part des souverains d’Allemagne. À Vienne même, l’empereur lui a donné le commandement d’un régiment de l’armée autrichienne qui porte désormais son nom. Nous ne parlons pas des fêtes, des revues, des décorations échangées : tout cela est l’accompagnement obligé des réceptions souveraines. Quand nous disons que le voyage du roi des Belges a été une sorte d’événement politique, c’est à plus d’un point de vue peut-être qu’on pourrait le dire. N’était-ce point d’abord la première fois que, le roi Léopold se trouvait si immédiatement, si familièrement en contact avec les grands souverains de l’Allemagne ? Ce que dix-huit ans de sagesse n’avaient pu faire, à ce point du moins, les évènemens des dernières années l’ont fait, ils ont amené les rois de l’Europe à reconnaîtra la prudence et l’habileté du souverain des Belges et à ne point se souvenir du tout de son origine révolutionnaire, qui a pu le rendre suspect pendant longtemps. Voilà donc la jeune nationalité belge, libérale et constitutionnelle, en faveur en Allemagne. Si quelque chose pouvait rendre plus saisissante cette phase nouvelle de la situation de la Belgique, c’est le principal incident du voyage du roi Léopold. Nous voulons parler du mariage arrêté entre le duc de Brabant et une princesse de la maison d’Autriche, l’archiduchesse Marie, fille de l’archiduc Joseph, ancien palatin de Hongrie. On a beaucoup cherché le sens mystérieux du voyage du roi Léopold, il est là tout entier probablement, et en vérité cela suffit bien. On ne saurait s’étonner que la Belgique ressente avec orgueil Cette fortune de sa maison royale et de sa politique. Elle voit ses princes s’alliant aux plus illustres, aux plus vieilles dynasties ; elle voit sa nationalité saluée et honorée, non plus officiellement, mais avec un caractère particulier de cordialité. De tous ces résultats, elle est redevable surtout au roi Léopold, et elle en est reconnaissante ; mais là, nous le pensons, se borne le sens de cette situation nouvelle, et plus affermie en Europe qui échoit à la Belgique. Y voir une tentative d’un caractère politique plus grave, qui tendrait à déplacer les influences et les affinités naturelles, à rapprocher l’ascendant de l’Autriche, ce serait sans doute aller