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Page:Revue des Deux Mondes - 1859 - tome 19.djvu/476

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même de l’empire mahratte, il y avait des Arabes, des Patans, des aventuriers de la côte de Cambay ; mais celui qui les excitait au carnage, Soukaram-Ghatgay, était un Mahratte de Bedjapour, et ils agissaient tous, en apparence du moins, au nom de Dowlat-Rao, qui ne tentait rien pour les arrêter. Enfin, chose qui paraîtrait invraisemblable si elle n’était attestée par des historiens dignes de foi, le besoin de se procurer de l’argent pour faire face aux dépenses de son mariage fut l’excuse mise en avant par Dowlat-Rao, honteux sans doute d’avoir participé indirectement à ces scènes de barbarie.

Les noces de ce jeune prince (il portait le titre de mahârâdja, grand roi) avec la fille du sanguinaire Soukaram-Ghatgay se célébrèrent quelques jours après cette horrible victoire, remportée par la faction de Sindyah sur Nana-Farnéwiz. Il y eut à cette occasion des fêtes splendides, qui contrastaient tristement avec la désolation de la ville, en proie à la terreur. Soukaram-Ghatgay, — connu désormais sous le nom de Shirzie-Rao, — prit dans ses mains teintes de sang la direction des affaires de son gendre, qu’il semblait associer ainsi à tous ses crimes. La nation mahratte trembla dès lors devant tous les deux ; ceux de Pounah et des provinces voisines commencèrent à les prendre en aversion. De son côté, le peshwa Badji-Rao, profitant de la chute de Nana-Farnéwiz, fit arrêter les ministres qui avaient partagé l’autorité avec celui-ci, et nomma une nouvelle administration. Débarrassé du vieux et habile chancelier, contre lequel il nourrissait depuis son enfance une haine jalouse, il allait se trouver en face de Dowlat-Rao-Sindyah, qui venait de se comporter au sein de la capitale non-seulement en maître absolu, mais encore en conquérant. Une lutte était imminente, et les plus clairvoyans ne pouvaient encore deviner si l’autorité du peshwa, brahmane de naissance et dépositaire du pouvoir royal, se ferait reconnaître jusqu’à la fin d’un jeune homme né dans la basse caste des çoudras, mal conseillé, et revêtu du titre de mahârâdja.


II

À peine âgé de vingt ans, et tout entier à la joie d’avoir obtenu en mariage la belle Baïzie-Bhaïe, fille de Ghatgay, Dowlat-Rao-Sindyah sembla d’abord prendre assez légèrement son parti sur les atrocités commises par son beau-père. Au lieu de quitter la capitale pillée par ses propres troupes avec une cruauté révoltante, il se tint à Pounah, laissant au général de Boigne le soin d’occuper Dehli et de veiller sur la personne de l’empereur Shah-Alam. Celui-ci trouvait dans les bons traitemens du général une consolation à ses malheurs. Cependant la population de Pounah ne souffrait pas