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Page:Revue des Deux Mondes - 1859 - tome 19.djvu/704

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alliance. Encore, même après 1830, il restait, quoique dans des conditions plus restreintes, l’alliance du nord, qui permettait à l’Autriche d’agir en Italie avec le solide appui des gouvernemens européens, demeurés hostiles à la France de la révolution de juillet. La guerre d’Orient est venue, et ce dernier reste de l’œuvre politique de 1815 a disparu, laissant l’Europe dans un certain trouble entre des alliances rompues et des alliances nouvelles plutôt entrevues que formées ou avouées.

Si l’on veut évaluer le chemin qu’a parcouru la politique européenne relativement à l’Italie, qu’on rapproche ces deux noms : le congrès de Laybach et le congrès de Paris. Il y a quarante ans, le cabinet de Vienne avait tout naturellement une voix prépondérante dans les affaires de la péninsule ; on délibérait sur les moyens de fortifier les gouvernemens absolus au-delà des Alpes et de réprimer l’esprit de réforme politique. Maintenant on délibère sur la situation des populations italiennes elles-mêmes ; on s’occupe de leurs vœux, de leurs plaintes, de leurs malaises trop évidens, et on songe moins à autoriser les interventions qu’à les faire cesser. En 1820, le représentant du roi de Sardaigne Victor-Emmanuel Ier était obligé de prendre au nom de son souverain l’engagement de ne réaliser aucune innovation libérale dans ses états ; aujourd’hui le Piémont est un pays constitutionnel, et les ministres du roi Victor-Emmanuel II sont les interprètes des vœux de l’Italie dans les congrès. N’est-ce pas le signe d’un grand changement dans la perspective des choses relativement à l’Italie ? Je ne veux pas dire que l’Autriche dût se trouver sans alliés en tous les cas ; cela signifie simplement que tout est changé, et que les traités de 1815 ayant notablement perdu de leur prestige, les conditions qu’ils avaient créées ayant disparu, l’Autriche se trouve moralement affaiblie dans la même proportion à ce point de vue général de la politique européenne.

Là est la réalité en effet, de telle sorte qu’après quarante ans de règne l’Autriche a perdu plus que gagné. Étrangère au milieu des populations italiennes qu’elle tient sous son sceptre, plus étrangère encore au milieu des populations sur lesquelles elle pèse de tout le poids d’une domination indirecte, moins garantie par l’esprit des traités qui l’ont placée au-delà des Alpes, elle se soutient sans s’établir. Sa domination est un fait qui se perpétue en étant toujours contesté, et j’ajouterai qu’elle est en Italie sans profit pour elle-même, car d’une part elle est liée dans les affaires de l’Europe par toutes les considérations de son intérêt conservateur au-delà des Alpes, et d’un autre côté, si le budget des provinces italiennes a été autrefois productif pour l’empire, il suffit à peine aujourd’hui pour payer les intérêts de la dette de la Lombardo-Vénétie, pour faire