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sais, c’est qu’elle ne se défendra que par le libéralisme des idées et des institutions contre des revendications toujours possibles.

Dégager incessamment la question italienne des solidarités révolutionnaires qui la compromettent, aussi bien que des menaces de dépossessions ou de transformations territoriales qui la compliquent au lieu de la simplifier, la ramener au point unique, au point fixe où elle est réellement, c’est-à-dire là où existe une domination étrangère, c’est là, si je ne me trompe, la vraie politique pour le Piémont et pour l’Italie. Et c’est la politique la plus vraie, la plus efficace, à un triple point de vue : parce qu’elle répond à la diversité des situations et des intérêts au-delà des Alpes, parce qu’elle laisse à la cause de l’Italie le caractère d’une généreuse et immortelle revendication de nationalité, parce qu’enfin elle est la plus pratique, la plus réalisable dans la situation générale de l’Europe. Elle atteint cette limite au-delà de laquelle elle n’est plus qu’une vaste conflagration où la question italienne elle-même disparaît derrière un amas de prétentions, de rivalités et d’intérêts. Tant qu’il ne reste qu’une contestation de la prépondérance autrichienne au-delà des Alpes et la substitution possible d’un pouvoir national à un pouvoir étranger dans l’Italie du nord, que peut dire l’Angleterre ? Elle a toujours été la bruyante instigatrice des agitations italiennes ; ses sympathies en faveur d’une émancipation nationale de la péninsule sont devenues une tradition populaire. Je ne voudrais pas dire que l’Angleterre se laisse lier par des précédens ; mais enfin, lorsqu’en 1848 la question se présentait dans les termes les plus décisifs, lord Palmerston n’hésitait pas à se prononcer sur la nécessité d’une cession de la Lombardie, sur l’impossibilité morale de la domination impériale, même dans le cas où les provinces italiennes seraient reconquises, et, prévoyant une guerre plus générale, il ajoutait dans une dépêche du 9 octobre 1848 : « Toutes disposées que pourraient être les puissances amies et alliées de l’Autriche à lui porter secours, si elle était menacée dans son existence propre et légitime en Allemagne, il existe au sujet de ses prétentions à imposer son joug aux Italiens un sentiment si universel de ce qu’elles ont d’injuste, que ce sentiment pourrait avoir pour effet de la laisser avec bien peu d’aide dans le cas d’une guerre… » Est-ce la Prusse qui peut être systématiquement hostile à une solution nationale de la question italienne ? Des liens évidens, plus intimes peut-être que par le passé, lient aujourd’hui les cabinets de Vienne et de Berlin. La Prusse irait-elle cependant jusqu’à garantir à l’Autriche la possession de ses provinces italiennes dans toutes les éventualités ? Quant à la Russie, bien clairement elle ne peut être défavorable à ce qui peut troubler la puissance de l’Autriche en Italie. C’est plutôt le Piémont qui au-