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Page:Revue des Deux Mondes - 1859 - tome 19.djvu/971

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il a été question plus haut, ainsi que tous les établissemens recevant des dépôts à intérêt, pouvaient être considérées comme favorables à la création des produits. Pour payer un intérêt de l’argent reçu, il fallait en effet l’employer généralement à des opérations plus rémunératrices que celles de l’escompte, qui ne présente pas, malgré un préjugé vulgaire, les mêmes bénéfices que toutes les autres industries. Aussi quelques-uns de ces établissemens s’adressaient-ils à une clientèle agricole qu’on doit considérer à bon droit comme une classe d’industriels, tandis que les autres se faisaient industriels ou spéculateurs pour leur propre compte. En Belgique, une grande société, due à l’initiative royale, avait été même spécialement fondée pour venir en aide à l’industrie proprement dite; à Paris, les banques Baudon, Gouin et Ganneron inauguraient avec des fortunes diverses cette série d’opérations dont les grands établissemens de crédit s’étaient jusqu’alors abstenus si soigneusement. Néanmoins il faut reconnaître que c’est depuis février 1848 surtout que le mouvement s’est généralisé, et que c’est de Paris que l’impulsion a été donnée. En effet, à côté de la nécessité d’activer la circulation du capital représentatif des valeurs produites, on a proclamé l’obligation non moins impérieuse d’activer le travail productif, en un mot de commanditer l’industrie. Les grandes créations dont le nom se présente à tous les esprits, les sociétés générales de crédit mobilier, dont le type, trouvé à Paris, a été invariablement reproduit au dehors, en Allemagne, en Espagne, en Italie, etc., ont eu pour caractère distinctif et pour raison d’être la commandite industrielle.

Trop peu de temps s’est écoulé depuis lors pour qu’il soit permis de décider si toutes les aspirations légitimes des esprits justement désireux des progrès industriels ont été satisfaites. Dès à présent, on ne peut s’empêcher de reconnaître que le grand mouvement dont nous signalions ici l’importance[1] a été favorisé puissamment par les sociétés dont il s’agit, et, sans renouveler un débat qui n’a pas encore de complets élémens, il y a peut-être lieu de rappeler deux objections produites contre les établissemens dont il s’agit. On a dit que le capital confié à l’industrie était par cela même immobilisé à long terme, et qu’après une courte période, les banques commanditaires de l’industrie seraient condamnées à une inaction complète, à moins de trouver dans leur propre crédit des ressources toujours renouvelées; qu’en cas de crise, elles se trouveraient dans l’impossibilité de faire face à leurs propres engagemens, étant hors d’état d’obtenir le remboursement des avances industrielles qu’elles auraient faites. À cette occasion, on a rappelé la liquidation des trois

  1. Voyez la Revue du 15 janvier 1858, la Spéculation et l’Industrie.