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le prix du tabac, et depuis quelques années les propriétaires se plaignent de l’abaissement de ce prix. Diminution d’un produit très favorable à l’exportation, conditions désavantageuses pour le travail intérieur, voilà, dit-on, ce qu’a produit le monopole. Ajoutons, comme grief irrécusable, que le gouvernement paie en papier les produits qu’il achète, et ne consent pas toujours à accepter ce papier en compensation des impôts qu’il perçoit. Les plaintes au sujet du monopole du tabac sont si vives qu’on parle de la nomination d’une commission spéciale pour aviser au meilleur parti à prendre.

La commission chargée de réaliser des économies dans tous les services pourrait arriver plus vite à un résultat avantageux pour les finances autrichiennes ; mais est-il permis de l’espérer ? En 1855, le chiffre des dépenses ordinaires s’élevait à 750 millions de francs ; en 1858, on le retrouve à 780 millions ou 315 millions de florins. Dans ce total, où le ministère de l’intérieur figure pour 26 millions, les ministères de la justice pour 15, de l’instruction publique et des cultes pour moins de 6, du commerce et de l’industrie pour 18, on ne voit guère de notables retranchemens à opérer. Les fonctionnaires sont peu rétribués en Autriche, et le traitement des ministres eux-mêmes ne s’élève pas à plus de 40,000 francs par an, tandis qu’un lieutenant en second touche à peine 800 francs de solde. Le service de la dette, qui n’exigeait que 33 millions de florins en 1847, en a réclamé 96 en 1858 ; l’année 1859 le verra considérablement accru, sans qu’il soit possible d’en rien retrancher pour 1860 au-delà des 6 millions des rentes annulées de l’amortissement, ce qui ne constitue qu’une mesure d’ordre et point une économie. Encore faut-il prévoir un nouvel et très prochain emprunt. L’armée, portée dans le chiffre des dépenses ordinaires pour 96 millions de florins seulement, a donné lieu à une dépense extraordinaire en plus de 24 millions en 1858. Quel sera le chiffre de 1859 ? On ne saurait l’évaluer approximativement ; mais c’est sur ce chapitre seul que des réductions pourront être obtenues. On parle déjà d’une économie de 38 millions de florins que la commission présidée par le baron de Schelchta opérerait dans le budget de l’armée : c’est un résultat considérable ; mais à quel budget s’applique-t-il ? Sans doute à celui de 1859, et sans doute aussi aux dépenses extraordinaires de l’armée, composée alors de 541,000 hommes d’infanterie, 129,000 de cavalerie et artillerie, et de 60,000 de corps exceptionnels. En pleine paix, les armemens de l’Autriche ne nécessiteraient pas moins des 96 millions de florins compris dans les dépenses ordinaires de 1858, lesquelles ont dépassé les recettes de 40 millions 1/2 de florins ; mais en 1860 l’Autriche jouira-t-elle d’une paix profonde ? Il est permis d’en douter ; par conséquent, on ne saurait compter sur des