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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




28 février 1861.

Plaignons-nous d’abord à voix basse de la lenteur avec laquelle s’engagent chez nous les travaux parlementaires. La session est ouverte depuis bientôt un mois, et nous ne comprenons guère l’emploi que le sénat et le corps législatif ont fait de ce temps. Ils ont enfanté deux projets d’adresse, et même en ce point le sénat a pris les devans sur le corps législatif. Nous avons eu l’occasion de témoigner, à propos du décret du 24 novembre, du peu de goût que avons pour cette controverse longue et stérile, pour cette sorte de pot-pourri de discours de omni re, pour la discussion de l’adresse en un mot, telle qu’on l’a ordinairement pratiquée en France. Il nous a toujours semblé qu’il y avait là une maladroite et peu profitable application de l’activité parlementaire. Le droit d’interpellation et le droit de motion, sobrement et sagement pratiqués, répondaient bien mieux aux besoins d’information du public et contrariaient bien moins la prompte et utile expédition des affaires. Dans l’exercice de ce droit, on distingue, on isole les questions, on les aborde avec opportunité, on aboutit à un résultat positif. Il n’en est point ainsi, avons-nous besoin de le dire ? de ce concours de harangues où l’on embrasse au même moment toutes les affaires du pays. Encore, pour éviter les inconvéniens et les abus de ce genre de débats, faudrait-il ne point le compliquer de pertes de temps inutiles.

En Angleterre, où M. de Persigny aime à chercher des exemples, l’adresse et la discussion à laquelle elle donne lieu n’occupent pas le parlement plus d’une soirée. Rien n’est plus logique ; des députés, des sénateurs, ou, comme on dit chez nos voisins, des M. P. et des pairs sont censés ne point vivre dans l’ignorance de la situation politique générale sur laquelle ils ont à exprimer leur pensée dans une adresse. On ne suppose pas chez nos voisins qu’il soit nécessaire de donner du temps à des hommes qui sont tenus d’être des hommes politiques pour se mettre au courant d’affaires et de questions