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disponibilité, ce groupe d’hommes si bien faits pour répondre à la fois aux plus diverses exigences de ces temps difficiles, pour donner à la résistance ses justes tempéramens, à l’esprit de liberté ses véritables freins, et pour inspirer confiance à tous en ne favorisant exclusivement personne. Si l’œuvre de 1830 pouvait être sauvée,

……… Si Pergama dextra
Defendi possent !…


c’était à la condition qu’une telle association ne se romprait que pour renaître, et que longtemps encore elle serait la sauvegarde et le soutien de l’édifice.

Or non-seulement cette espérance s’était évanouie, non-seulement le cabinet du 11 octobre ne pouvait plus revivre, mais le désir de le reconstituer allait devenir bientôt un germe de discorde, et soulever au sein de la majorité les plus dangereux conflits.

Ce n’était pas dès les premiers momens qui suivirent la rupture que ce désir pouvait se faire jour. Tant que les deux fractions rivales qui venaient de se séparer essayèrent, chacune isolément, de porter tour à tour, et par leurs propres forces, le fardeau des affaires, toute pensée de rapprochement était prématurée ; mais lorsqu’après un an d’infructueux essais, six mois d’efforts dans un sens et six mois dans un autre, on vit paraître une troisième tentative sous les auspices et sous la direction d’un homme considérable dans le parti de l’ordre, également éminent d’esprit et de position, et qui, sans avoir fait partie du cabinet du 11 octobre, avait pourtant donné des gages, dès le début du nouveau règne, et à la royauté et à l’opinion modérée ; lorsque ce nouveau chef laissa voir l’intention de gouverner sans le concours des influences reconnues et acceptées jusque-là, de se créer en dehors d’elles, avec l’appui de la couronne, un parti de gouvernement, en d’autres termes, de rallier l’armée en excluant les généraux, on comprend que l’espoir, jusque-là chimérique, de renouer le faisceau rompu et de le rétablir sur sa base première, ait pris bientôt assez de consistance pour séduire des esprits qui de très bonne foi croyaient que le pouvoir nouveau, malgré son habileté et ses heureux débuts, s’engageait dans des voies dangereuses, abandonnait trop tôt l’attitude de la résistance, ne couvrait pas assez la royauté, et laissait en souffrance les conditions vitales du gouvernement représentatif.

Je ne cherche pas ici jusqu’à quel point ces reproches étaient fondés, et si ces dissidences politiques provenaient en partie de griefs personnels ; encore moins voudrais-je examiner de quel côté était le premier tort, à supposer qu’il y en eût un : je ne constate