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Page:Revue des Deux Mondes - 1862 - tome 37.djvu/565

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des pétitions de ce genre ; il en voulait une troisième « moins laconique et plus claire. » Il fallait reconnaître une faute, implorer un pardon. « Je vous remercie, monsieur, lui répondit Eliot, mais je me sens la tête un peu faible en ce moment. Quand il aura plu à Dieu de me rendre l’exercice complet de mes facultés, je songerai à votre amicale insinuation. » Il n’y donna plus une pensée, et mourut sans avoir fléchi. Son fils réclama les restes paternels ; il voulait les transporter dans le comté de Cornouailles, où était le domaine de famille. La pétition revint avec cette décision écrite au bas : « Le corps de sir John Eliot doit être enterré dans l’église de la paroisse où il est mort. » C’était la chapelle de la Tour.

Pym et Hampden étaient les amis d’Eliot. Sa destinée pouvait devenir la leur. Ils se promirent de l’imiter au besoin, de le venger, s’ils en avaient jamais l’occasion. Quand l’occasion s’offrit, tous deux étaient morts. La vengeance n’en fut pas moins accomplie.


II

Dans le règne de Charles Ier, nous ne relevons que les incidens principaux de la lutte qui, s’engageant comme on l’a vu, aboutit plus tard à l’acte mémorable dont nous voulons faire ressortir l’importance. Les années pendant lesquelles il gouverna de fait, sans parlement, à l’aide de mille ressources fiscales dont pas une n’aurait pu se justifier en droit rigoureux, ne rentrent dans le cadre de cette étude que par les griefs nombreux qu’elles accumulèrent contre l’imprudent monarque. Livré à lui-même, ne s’inspirant plus que du besoin de consolider une autorité à laquelle le pays silencieux, mais frémissant, n’accordait aucune sympathie, il sème partout les germes de révoltes futures. Amendes extorquées sous les plus étranges prétextes, droits surannés qu’on fait revivre pour contraindre à d’injustes compositions, confiscations pures et simples comme celles de Strafford en Irlande, monopoles rétablis et vendus à des corporations, taxe des vaisseaux, procès de Hampden, tel est fort en abrégé le bilan politique et financier de ces dix années de règne. Les audacieuses entreprises de Laud pour faire rentrer de force dans le bercail de l’église officielle, de l’église qui prêchait le droit divin, toutes les sectes indépendantes, les tentatives secrètes de rapprochement avec Rome, en voilà le bilan religieux. Les sentences de la chambre étoilée, les supplices infligés à Leighton, à Prynne, Burton, Bastwick, l’établissement des cours de haute commission véritables tribunaux de censure inquisitoriale, en voilà le bilan judiciaire. Au dehors toute influence est perdue ; au dedans la soumission s’use. Un beau jour, les dévotes d’Edimbourg jettent