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Page:Revue des Deux Mondes - 1862 - tome 37.djvu/576

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en venait aux remèdes commandés par la situation. Ils pouvaient se résumer en peu de mots : précautions contre le papisme, dont une commission spéciale surveillerait les menées[1], sûretés à demander pour la stricte et loyale administration de la justice, garanties à prendre contre les mauvais conseils donnés au roi, c’est-à-dire participation du parlement au choix des ministres, et assujettissement strict de ceux-ci aux lois du pays. Le terrain de la lutte se trouvait ainsi circonscrit.

Les royalistes, après avoir épuisé tous les moyens d’ajournement, attaquèrent la remontrance comme inutile. « À quoi sert, disent-ils, de détailler tous ces griefs, dont la plupart ont reçu satisfaction ? Cela est-il à propos au moment où le roi revient parmi nous ? Devons-nous troubler sa bienvenue ? — C’est justement afin d’assurer les concessions dont vous parlez que cet appel au pays est nécessaire, leur répond le chef de l’opposition. Le roi est assiégé par des influences hostiles et sollicité de reprendre ce qu’il a donné. Nous serions coupables de ne pas veiller sur ces précieuses conquêtes. — Une pareille déclaration excède nos pouvoirs, reprenait Hyde. Nous ne pouvons seuls parler au peuple ; le concours des lords est indispensable. S’il s’agit d’une apologie, et si elle est nécessaire aux membres de la présente assemblée, il est inutile de remonter si loin. On pourrait se permettre, dans une intention pacifique, de livrer au public un pareil document ; mais vu les circonstances où nous sommes, c’est au contraire un brandon de discorde. De plus il y a imprudence à implorer ainsi les secours du dehors. C’est laisser voir sa faiblesse : un bon général dissimule, au lieu d’en faire montre, ce qui peut manquer à son armée. Pourquoi rappeler la mort d’Eliot ? C’est toucher à l’honneur du roi, qui est aussi notre honneur. Il y a solidarité entre un prince et son peuple. De même que l’avilissement des sujets rabaisse le monarque, de même l’abaissement du monarque avilit ses sujets. » Falkland, orateur emporté parce qu’il est timide, prend ensuite la parole d’une voix vibrante. — La prétention que les communes affichent d’approuver le choix des ministres lui semble une dérision. Le roi choisit ses

  1. Pym n’était ni bigot sectaire, ni persécuteur. Il avait fait sa profession de foi là-dessus devant le short-parliament (le parlement d’avril 1640). « Je ne veux, disait-il, ni lois nouvelles contre le papisme, ni rigueur dans l’application des lois existantes. Je ne veux ni ruiner les catholiques, ni les frapper dans leur personne. Je demande seulement qu’ils soient mis hors d’état de nuire… Les principes du papisme le rendent incompatible avec toute autre religion. La loi ne domine pas un catholique, son serment ne le lie point. Le pape peut dispenser de l’exécution des lois et relever du serment. Contre le sentiment, contre la raison des catholiques son autorité prévaut. Il peut les pousser malgré eux à troubler l’état, non-seulement au spirituel, mais au temporel. Leur faiblesse seule peut nous rendre la sécurité. »