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Page:Revue des Deux Mondes - 1862 - tome 37.djvu/691

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LA POLITIQUE
DU LIBRE ÉCHANGE

IV.

UN PRINCIPE NOUVEAU.



Notre époque est pleine d’imprévu.et de contrastes bizarres : pour qui l’observe, elle devient presque une énigme à force de contradictions. Tel peuple longtemps amoureux de ses institutions libérales en fait tout à coup bon marché, tandis que sur d’autres points des populations endormies se réveillent avec la fièvre de l’indépendance. Une nation libre d’ancienne date, et citée autrefois pour sa turbulence politique, en arrive à un calme intérieur qui touche à l’apathie, et les souverainetés absolutistes, honteuses de leur immobilité, courent après le mouvement. Jamais l’esprit de conservation n’a été plus vigilant ni plus tenace, et l’esprit novateur s’infiltre en toutes choses. Chaque race prétend se caser à sa convenance, sans le moindre souci des contrats diplomatiques. L’ancien droit de la force, les instincts de conquête, tombent en discrédit, et rarement on a mis sur pied des armées aussi formidables. Les haines nationales s’amortissent ; au lieu de s’isoler comme autrefois dans un égoïsme farouche, d’aviser sans cesse aux moyens de se nuire, les peuples sont disposés à renverser les barrières : ils comprennent que tout progrès chez l’un est profit pour les autres, et malgré cela on vit dans l’appréhension d’un embrasement général.