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mais au moins de ceux qui restent fidèles à l’église. Or, comme c’est à ceux-là que s’adressent précisément les réformateurs catholiques, il ne semble pas qu’ils aient grande chance d’en être écoutés.

Sur le terrain des dogmes, il s’est produit un progrès analogue à celui que nous venons d’indiquer pour le culte. Je n’entends pas trancher la question de savoir si l’on a promulgué successivement de nouveaux dogmes ; je veux seulement dire que le nombre des dogmes que l’on a successivement définis et imposés sous peine d’anathème a été en augmentant. Ici encore cette marche a été l’effet d’une tendance très naturelle et très puissante. En effet, si c’est un des plus nobles attributs de la raison que cette soif de la vérité, cette ardeur de tout pénétrer, de tout scruter, suivant le conseil de saint Paul : probate omnia, ce goût n’est cependant pas celui de tout le monde. Les masses aiment plutôt à recevoir de leur pasteur la formule de leur foi. La route leur semble plus assurée quand elles peuvent se dire : Ce que je dois croire a été décidé par une autorité infaillible, et sans m’épuiser en vaines recherches, je puis me livrer en paix aux occupations de la vie et aux pratiques de la piété. — Étant donné un juge de la foi qui ne peut se tromper, quoi de plus naturel que de lui demander de trancher définitivement les questions qui peuvent s’élever à ce sujet ? C’est donc le besoin d’autorité qui a produit le progrès du dogmatisme tel que nous le montre l’histoire. Le premier, le plus important des dogmes, est celui qui porte sur la nature du Christ. C’est sur ce point que se concentre d’abord le travail des conciles. À Nicée, l’identité de substance avec Dieu est reconnue au Fils. Reste ensuite à sauvegarder en lui la nature humaine et l’unité de la personne, tout en affirmant la double volonté. Cette élaboration est l’objet des décisions des conciles jusqu’au VIIe siècle. Au IVe siècle, on s’occupe de fixer le canon, qui est définitivement arrêté, sous Augustin, dans les conciles de Carthage et d’Hippone. Puis viennent, chacun en son temps, les dogmes du péché originel et de la rédemption, des sacremens, de la présence réelle, de la résurrection, et à Trente enfin on arrête le formulaire de la foi, on classe les trésors accumulés de la tradition. On a pu croire alors que la longue et majestueuse élaboration de la dogmatique était arrivée à son terme et que la tradition avait pris sa forme définitive ; mais le besoin qui avait produit les développemens antérieurs subsistait : il devait encore en amener d’autres. C’est le propre de la piété, quand elle est sincère et exaltée, d’accumuler sur l’objet de sa vénération toutes les perfections au point de l’élever au-dessus de l’humanité et de le rapprocher aussi près que possible de Dieu, si on ne peut plus le diviniser. Ainsi faisait le polythéisme. De là aussi est sorti le dogme le plus récem-