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l’air est raréfié, et n’offre plus aux surfaces planes qu’une résistance du tiers ou du quart de celle que vous éprouvez près du sol; mais l’aéronef n’a pas la prétention de monter dans ces hautes régions : il naviguera entre la terre et les nuages (inter utrumque volat), juste assez haut pour ne se heurter ni aux arbres, ni aux clochers, ni aux montagnes, et quand il rencontrera le cours d’un fleuve, il suivra la vallée, cette voie aplanie par la nature. On doit convenir que ces objections sont secondaires. La difficulté n’est pas là; elle se trouve tout entière dans le moteur qui doit donner la vie au système.

Dans l’industrie moderne, un perfectionnement d’une immense portée serait de réussir à emmagasiner les forces que la nature a mises avec tant de libéralité à la disposition de l’homme. Que ne peut-on faire pendant le jour provision de lumière pour la nuit! Que ne peut-on pendant l’été amasser de la chaleur, comme on amasse du grain pour l’hiver, mettre de côté l’abondante électricité d’un nuage orageux pour la consommer à l’heure du besoin, emprisonner l’effort du vent au moment d’une tempête, le poids de l’eau dans une cataracte, pour les rendre peu à peu libres et puissans sur la machine que l’on veut mettre en action! Lumière, chaleur, force, électricité, il faut, si nous voulons profiter des dons de la nature, les consommer au moment précis où elle nous les prodigue, et, si nous en avons besoin plus tard, il faut les produire nous-mêmes aux dépens de notre travail. Il ne serait pas tout à fait exact de dire qu’on ne peut emmagasiner la force motrice, car le poids de l’horloge, le ressort d’un tournebroche ou d’une pendule, sont des organes où l’on accumule de la force par un travail de quelques secondes pour suffire à la consommation de plusieurs heures. Malheureusement ce qui est possible sur une petite échelle ne peut être réalisé en grand. On peut faire marcher une montre au moyen d’un ressort, on ne saurait faire tourner la roue d’un moulin. Parce qu’un jouet d’enfant s’élève en l’air grâce à la rotation d’une hélice, on ne doit pas en conclure que l’aéronef se comportera de même, car ce dernier appareil ne peut emporter une provision de force, et il doit enlever avec lui son moteur. Du reste, M. de Ponton d’Amécourt ne s’est pas fait illusion à cet égard, et il a envisagé le problème dans toute sa difficulté. Il cherche un moteur léger; seulement il ne s’est peut-être pas assez rendu compte de combien devrait être allégée la machine à vapeur actuelle pour convenir au système qu’il préconise.

Ici je crains que cette discussion, malgré mes efforts pour l’abréger, ne prenne un caractère trop mathématique. Cependant il faut recourir au calcul, qui peut seul trancher la question. Un corps solide descend dans l’air d’environ 5 mètres en une seconde par