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le Slesvig et le Holstein ? — C’est dans ce cercle que se renferment les conjectures que l’on peut former sur la conduite future des puissances allemandes. Nous allons examiner ces diverses hypothèses au point de vue des principes qui nous paraissent devoir être ceux de la politique française.

Nous l’avouerons, nous n’espérons guère, après le sang versé, que l’Autriche et la Prusse s’en tiennent vis-à-vis du Danemark aux véritables engagemens de 1851-52. Sans doute la brutalité de leur agression n’a conféré aux puissances allemandes aucun droit nouveau, et lord Palmerston a eu raison de flétrir cette politique odieuse qui, pour se soustraire à d’anciens engagemens et s’exciter à des prétentions nouvelles, voudrait qu’il pût lui suffire d’attaquer par la force ouverte l’objet de ses convoitises. La protestation de lord Palmerston est celle de la morale même ; malheureusement la nature humaine est ainsi faite qu’il n’est guère probable que l’Autriche et la Prusse, après avoir tiré le sabre, veuillent ou puissent rentrer purement et simplement dans les limites des anciennes conventions diplomatiques. Les polémiques allemandes ont répandu d’ailleurs une telle confusion sur la question des duchés, qu’il n’est pas permis d’espérer que la Prusse et l’Autriche veuillent reconnaître la seule interprétation légitime des engagemens de 1851-52. Voyons en effet quels étaient ces engagemens, et comment la chicane allemande les a rendus impraticables pour le Danemark.

Les stipulations que l’on appelle les engagemens de 1851-52 sont contenues dans trois dépêches échangées entre les cabinets de Copenhague et de Vienne. Dans la première de ces dépêches, le ministre danois, M. Bluhme, exposait ses vues sur le gouvernement du Slesvig et du Holstein ; dans la seconde, le prince Schwarzenberg, alors premier ministre d’Autriche ; interprétait au nom de l’Allemagne les explications données par M. Bluhme ; dans la troisième, celui-ci acquiesçait purement et simplement à l’interprétation du prince Schwarzenberg. Voici les points, se rapportant au débat actuel, qui sont à relever dans ces trois dépêches. Le ministre de Danemark disait dans son exposé que le roi était prêt à renouveler la déclaration faite par son père, à savoir qu’il n’incorporerait point le Slesvig au Danemark, et qu’il ne prendrait aucune mesure pour amener ce résultat Il voulait bien conserver quelques liens sociaux entre la noblesse du Slesvig et celle du Holstein, tels que des facilités de crédit et l’admission réciproque aux institutions conventuelles des deux duchés ; mais le roi de Danemark repoussait nettement toute union ou assimilation politique du Slesvig et du Holstein ; il annonçait l’abolition des tribunaux d’appel et du ministère commun qui avaient été octroyés aux duchés en 1836. Enfin il se déclarait prêt a donner à l’ensemble de la monarchie danoise des institutions représentatives auxquelles les duchés participeraient par des délégués de leurs assemblées locales. La réponse du prince Schwarzenberg à l’exposé danois est remarquable. Le ministre autrichien voulut que les promesses du cabinet danois prissent le caractère d’un en-