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leurs infanteries, ils attendaient avec patience que les comités et les commissions eussent terminé leurs rapports et leurs travaux, leurs études et leurs expériences. Cela n’empêche pas le fusil à aiguille prussien d’être très connu dans le monde de la spécialité et d’avoir été maintes fois décrit dans ses livres ; la théorie même de l’arme était enseignée dans tous les cours d’art militaire. En voici une description que nous citerons de préférence. Elle est empruntée à un livre qui a paru en 1864 avec l’approbation du ministre de la marine et des colonies. Il a pour titre : Cours de tir à l’usage de MM. les officiers qui n’ont pu suivre les cours de l’école normale de tir de Vincennes, par M. Cavelier de Cuverville, lieutenant de vaisseau, qui a lui-même été un élève de l’école normale de Vincennes. On lit page 517[1] :


« Le fusil rayé prussien est appelé Zündnadelgewehr, parce que l’inflammation de la charge est produite par une aiguille qui traverse la cartouche pour aller frapper la poudre fulminante contenue dans un sabot en bois ou en papier comprimé. Vers la partie inférieure du canon se trouve une chambre légèrement conique, destinée à recevoir la cartouche, et un fort conducteur ou canal ouvert, à l’extrémité antérieure duquel est vissé le canon. Entre les côtés du canal conducteur est un tube de fer auquel est attachée une forte poignée passant à travers une ouverture pareille à l’entaille de la douille d’une baïonnette, et qui permet de le porter en arrière ou en avant. Lorsque ce tube est poussé en arrière autant que le permet cette entaille, il se trouve une ouverture entre son extrémité et celle du canon par laquelle on introduit la charge. Le tube est alors poussé en avant jusqu’à ce que son extrémité, qui a la forme d’un tronc de cône, vienne s’adapter au canon, qui a en creux une forme semblable pour la recevoir. La poignée étant ensuite tournée dans l’entaille, le tube se trouve parfaitement serré dans le canon.

« Le tube présente à sa partie antérieure une portion pleine sur laquelle réagit la charge, comme sur la culasse des armes ordinaires, et au milieu de laquelle est vissée une tige qui, au lieu d’être pleine comme dans les armes à tige, est percée dans toute sa longueur pour livrer passage à l’aiguille qui doit enflammer la charge. Cette aiguille est formée d’un fil d’acier d’environ 3 millimètres de diamètre, et terminée brusquement en pointe vers l’extrémité qui doit enflammer la charge ; à l’autre extrémité, elle est vissée dans un tube de cuivre, vissé lui-même dans la partie inférieure d’un autre tube autour duquel s’enroule un ressort en spirale ; deux gâchettes à ressort dirigent le tube porte-aiguille dans l’intérieur du tube-culasse ; ce dernier ayant été serré contre le canon au moyen de sa poignée, l’aiguille se trouve liée à la détente de la batterie et l’arme prête à être tirée.

  1. On trouvera une autre description du fusil à aiguille prussien dans l’intéressante brochure que M. le colonel fédéral Edmond Favre a publié à Genève sous ce titre : L’armée prussienne et les manœuvres de Cologne.