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milieu d’un parc : elles contiennent tous les appareils imaginés pour soumettre le corps humain à l’action de l’eau en vapeur, en douches, en jets, en gouttelettes ; il y a là non-seulement des baignoires et des piscines, mais des douches écossaises, des douches générales, des douches locales, des douches circulaires chaudes, froides, tièdes, brûlantes, glacées. Une sorte de tribune munie de manivelles correspondant aux tuyaux de chaque appareil permet à un seul infirmier d’administrer en même temps dix bains d’espèce différente. Les salles de sudation et d’hydrothérapie touchent à une chambre où sont rangées les boîtes à fourneau destinées aux fumigations aromatiques et cinabrées[1]. En 1869, les salles ont vu donner 231,201 bains de toute espèce. Le docteur Thierry, qui au siècle dernier était si heureux de retrouver sur un de ses cliens la pituite vitrée, perdue depuis les anciens, aurait aujourd’hui de quoi se réjouir, car les salles ont vu passer des malheureux atteints de ces épouvantables maladies dont l’extrême Orient semble avoir gardé le monopole. Qu’il y eût parmi nous quelques cas très rares d’éléphantiasis, nous le savions ; mais que la lèpre, la vraie lèpre, la lèpre biblique, se trouve encore parfois dans la population parisienne, c’est ce qui est fait pour surprendre, et cependant l’on n’en peut douter lorsqu’on a consulté les registres de l’hôpital bâti par Henri IV.

Saint-Louis possède deux raretés d’un ordre bien différent, un ormeau gigantesque qui fut un des arbres de la liberté plantés pendant la révolution, et quelques masures noircies, effondrées, qu’on va bientôt démolir, qui furent la première usine à gaz de Paris ; mais l’hôpital offre une curiosité bien plus importante, c’est un musée pathologique, qui, déjà considérable, pourra devenir d’une richesse sans pareille. Il contient non-seulement des estampes, des photographies, des moulages, mais aussi des fac-simile de tous les cas intéressans qu’on a recueillis dans les services. L’imitation de la nature, obtenue à l’aide des procédés de M. Baretta, fait illusion, et donne une sécurité parfaite à l’observateur. Malheureusement on n’a pu ranger cette précieuse collection que dans un local tout à fait insuffisant ; on a fermé un passage de communication, on l’a muni d’armoires vitrées, et c’est là le musée. Il est regrettable que l’administration n’ait pu disposer tout de suite d’un emplacement très vaste, car il y a là le principe d’une institution excellente qu’il faudrait encourager vivement et généraliser dans tous les hôpitaux. L’assistance publique en sentira certainement bientôt elle-même la

  1. Le système des bains est très développa aujourd’hui dans nos hôpitaux. En additionnant ceux qui ont été administrés aux malades internes, 322,391, — aux malades externes, 212,606, au bureau central, 4,461, — aux indigens a la suite d’ordonnances délivrées dans les maisons de secours, 60,167, — on voit que pendant le cours de 1869 l’assistance publique a donné gratuitement 599,718 bains.