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n’avoir pas opéré avec vigueur contre l’armée d’investissement, de ne pas s’être emparé, le 31 au matin, des positions que l’ennemi occupait sur la rive droite pour le rejeter vers la rive gauche de la Moselle. On pouvait différer d’opinion sur l’opportunité de partir ; on ne le pouvait sur la nécessité de frapper de grands coups autour de Metz. C’était une offensive poussée à fond, c’étaient des opérations vigoureuses dans le rayon de la place, qu’avait demandées le conseil de guerre, qu’imposait la situation. On avait vu le 31 au soir, lorsque deux batteries prussiennes étaient restées entre nos mains, que les retranchemens ennemis ne résisteraient pas longtemps à l’ardeur de nos soldats, qu’en nous portant sur un point avec résolution nous percerions des lignes peu profondes, nous emporterions des ouvrages peu avancés. La trouée était faite dès lors : il s’agissait de l’élargir et de couper en deux l’année allemande, obligée de s’étendre sur un espace de 45 kilomètres. Si nous battions nos adversaires sur une des deux rives de la Moselle, nous les forcions peut-être à se retirer sur l’autre, nous reprenions en tout cas la liberté de nos mouvemens. C’eût été une heureuse et habile manœuvre de nous dégager enfin de l’étreinte qui nous enlaçait depuis le 18 août, de maintenir nos communications avec le dehors en occupant des positions bien choisies, de faire entrer aussitôt des approvisionnemens dans la place par la porte qu’on tiendrait ouverte, et d’envoyer notre cavalerie fouiller tous les villages, ramasser au loin les abondantes récoltes de l’année. Il semblait qu’il n’y eût alors d’autre embarras pour le commandement que la difficulté de choisir entre les opérations nombreuses dont la possibilité s’offrait à l’esprit. Qui se fût douté le 1er septembre que cette armée qui venait de se battre avec tant de vigueur, cette armée résolue à vaincre partout où on la concentrerait, en mesure de se porter tout entière sur un point déterminé de l’enceinte, et d’y attaquer l’ennemi avec la supériorité du nombre, se réunissait pour la dernière fois, qu’on ne lui demanderait plus désormais d’autre vertu que la patience, d’autre effort que la résignation ? Hélas ! ce n’est plus de combats que nous aurons à parler maintenant. La politique va bientôt commencer son œuvre, en attendant que la famine la consomme.


II

La période des opérations militaires autour de Metz se termine réellement le 1er septembre, treize jours après le commencement du blocus, deux mois avant la capitulation. Il y aura encore des engagemens partiels, quelques coups de main heureux où se