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Page:Revue des Deux Mondes - 1871 - tome 95.djvu/961

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des vivres et des fourrages, qu’on entrerait en pourparlers avec l’ennemi pour traiter d’une convention militaire. » M. le général Coffinières le nie. Il eût été juste de reconnaître que cette dénégation s’adresse au maréchal et non pas à moi. Ce n’est pas contre mes paroles, c’est contre le procès-verbal de la séance du 10 octobre publié par son chef et revêtu de la signature de tous les membres du conseil, que M. le général Coffinières s’inscrit en faux.

A propos du conseil de guerre, M. le général veut bien m’apprendre que les règlemens militaires n’en reconnaissent pas l’existence officielle. Il me l’avait déjà appris dans une publication antérieure que j’ai lue trop attentivement pour en oublier le contenu. Ce n’est donc point par erreur, c’est avec intention que j’ai parlé d’un partage de responsabilité entre le commandant en chef et ses subordonnés dans la journée du 20 août, où il fut résolu à l’unanimité que l’armée resterait sous les murs de Metz. Il ne s’agit point ici de la série des opérations militaires, il s’agit d’une question précise, déterminée, sur laquelle le commandant en chef embarrassé consulte les commandans de corps d’armée et les commandans des armes spéciales. Convient-il de s’ouvrir un passage à travers les troupes ennemies pour gagner l’intérieur de la France, ou de conserver la position stratégique de Metz en y retenant en face de soi des forces considérables ? A la question ainsi posée tous les assistans répondent d’un commun accord qu’il vaut mieux ne pas s’éloigner de la forteresse. Le lendemain de cette délibération, en ce qui concerne le point spécial qui vient d’être discuté, la responsabilité personnelle du maréchal n’est-elle pas singulièrement allégée ? Ai-je tort d’écrire qu’officiellement, c’est-à-dire dans ses rapports avec l’empereur, il peut toujours se retrancher derrière l’opinion unanime de ses subordonnés pour se justifier de n’avoir pas marché vers le nord et tenté plus énergiquement de donner la main au maréchal de Mac-Mahon ?

Quand je dis que le maréchal Bazaine livra le combat de Sainte-Barbe sans se croire obligé à de grands efforts, je n’admets pas qu’on puisse se méprendre sur ma pensée. J’entends par là, comme toute la suite du raisonnement le prouve avec évidence, des efforts qui auraient pour but de percer les lignes ennemies afin de s’éloigner de la place, et non des opérations vigoureuses contre les Prussiens, ainsi que paraît le croire M. le général Coffinières. Je reproche au contraire au maréchal Bazaine de n’avoir pas cédé au vœu des chefs de corps et de n’avoir point agi avec vigueur autour de Metz. Je regrette d’avoir à me citer moi-même ; mais le sens équivoque que mon honorable contradicteur prête à mes paroles m’y oblige malgré moi. Voici mes propres expressions. « On pouvait différer d’opinion sur l’opportunité de partir ; on ne le pouvait sur la nécessité de frapper de grands coups autour de Metz. C’était une offensive poussée à fond, c’étaient des opérations vigoureuses dans le