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LE LAURIUM
ET
LES MINES D’ARGENT EN GRÈCE

Nous voyons ordinairement l’antiquité grecque à travers nos souvenirs classiques ; nous regrettons volontiers avec le poète ces temps

…… Où le ciel sur la terre
Marchait et respirait dans un peuple de dieux.

En notre siècle de prose, nous aimons à nous représenter ces sociétés affinées et polies, ce peuple de penseurs, d’artistes et de guerriers, amoureux de la beauté sous toutes ses formes, et uniquement voué au culte de l’idéal. Dans ce brillant tableau, le travail, l’humble trayait des mains, n’apparaît nulle part. Alors pourtant, comme aujourd’hui, il était la grande loi de l’humanité, et l’âge d’argent n’en fut pas plus exempt que l’âge d’airain ou l’âge de fer. Seulement, l’organisation sociale antique étant fondée sur l’esclavage[1], les hommes libres tenaient l’industrie en médiocre estime, et les écrivains en parlent rarement. L’industrie formait cependant l’une des sources les plus importantes de la richesse publique ; c’est ainsi que l’exploitation des mines du Laurium a puissamment contribué à la grandeur et à la prospérité de la république athénienne aux temps de Thémistocle et de Périclès.

Une récente excursion dans l’Attique nous a permis d’examiner les traces de l’ancienne industrie minière. Sur une surface de 20,000 hectares, le sol a été fouillé dans tous les sens, percé de puits nombreux, recouvert par des masses énormes de déblais et

  1. Lors du dénombrement de Démétrius de Phalère (309 ans avant Jésus-Christ), l’Attique, pour une population de 450,000 habitans, comptait seulement 20,000 citoyens libres et 10,000 étrangers.