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le désir de prendre pour femme la mère de ses pupilles. Vers la fin de la tutelle, il épousa la fille d’Onétor. Quant à Démophon, il ne parait pas avoir jamais non plus manifesté l’intention d’épouser l’orpheline que son père avait fiancée avec lui à son lit de mort.

Pour ce qui était de l’administration des biens, les tuteurs ne se montrèrent pas plus soucieux de respecter les volontés de leur parent et ami. Il y avait pour les tuteurs, à Athènes, deux manières de s’acquitter de leur tâche : ils pouvaient ou gérer, à leurs risques et périls, la fortune de leurs pupilles, comme ils auraient fait la leur propre, ou la donner tout entière à bail, affermer les biens meubles et immeubles pour un laps de temps égal à la durée même de la minorité et de la tutelle. C’était, à ce qu’il semble, ce dernier parti que devaient prendre la plupart des tuteurs, ceux du moins qui ne nourrissaient point l’arrière-pensée de pécher en eau trouble, de s’enrichir aux dépens des orphelins en s’appropriant une partie de la succession. Par cette location, le tuteur se débarrassait en effet non-seulement de tout soin d’administration, mais encore de toute responsabilité pécuniaire ; il coupait court pour l’avenir à toute chance de procès. Or c’était là un résultat qu’il n’était pas sûr d’obtenir même par une honnête gestion des biens ; on voyait des jeunes gens arrivés à leur majorité chercher de mauvaises querelles à des tuteurs qui avaient pourtant fait de leur mieux. Quand on met le pupille en possession de sa fortune, il est rare qu’il la trouve aussi considérable qu’il l’eût désiré. De là à s’en prendre au tuteur il n’y a qu’un pas, et ce pas, sous l’influence des donneurs de mauvais conseils, on était bien vite entraîné à le faire.

Les tuteurs s’étaient-ils au contraire résolus à louer les biens, tout danger de cette espèce s’évanouissait. Ils avertissaient de leurs intentions le premier en dignité de tous les magistrats, celui qui avait l’honneur de donner son nom à l’année attique ; à cause de ce privilège, les grammairiens appellent ce personnage l’archonte éponyme, ou plus simplement l’éponyme, tandis que les orateurs se contentent de le désigner comme l’archonte, c’est-à-dire l’archonte par excellence, le chef de ce collège qui se composait de neuf citoyens annuellement désignés par le sort. La compétence de l’archonte embrassait toutes les actions publiques et privées qui naissaient du droit personnel, et particulièrement du droit de la famille, qui forme le premier et le plus important chapitre du droit des personnes. « Que l’archonte prenne soin, dit une loi athénienne, qui est citée dans un discours de Démosthène, des orphelins, des héritières, des maisons abandonnées et des femmes veuves, qui, après la mort de leur mari, se disent enceintes et restent dans la demeure conjugale. Toutes ces personnes, qu’il en prenne soin et qu’il les défende de toute violence. » Aussitôt prévenu, l’archonte